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Dialogues des Carmélites à Lyon et Nantes/Angers - Poulenc omniprésent

Elles n’eurent guère de chance ces Carmélites de Compiègne, décollées dix jours avec le 9 Thermidor. Gageons que la chute de Robespierre leur aurait épargné l’échafaud. Mais Poulenc, lui, fut chanceux en mettant en musique la pièce que Bernanos tira de cet épisode historique qui lui inspira une nouvelle puis les dialogues d’un film abandonné, vite reconvertis pour le théâtre. Le romancier ne verra d’ailleurs pas le succès de cette pièce crée en 1951, après sa mort, à Zurich en langue allemande, juste retour des choses puisque le premier écrivain à s’être penché sur ces Carmélites fut une poétesse allemande catholique, Gertrud von Le Fort.

On connaît la suite. Ricordi l’éditeur italien de Poulenc lui suggéra en 1953 de tirer de la pièce un opéra. Evidemment l’ouvrage serait conçu pour un théâtre italien, finalement la Scala de Milan, et en langue italienne. Poulenc s’enthousiasma, réalisa lui-même l’adaptation, le chant piano fut achevé en 1955, Flavio Testi se chargea de la traduction, et le point final à l’orchestration fut posé l’année suivante, tout cela malgré un imbroglio juridique pour une question de droits d’auteur qui plongea Poulenc un temps dans une forte dépression, premier signe d’une santé qui allait continuer à se dégrader. Milan fit un accueil triomphal à l’ouvrage (26 janvier 1957), et Paris de même le 21 juin 1957, l’ouvrage connaissant dans la foulée des créations à San Francisco, Cologne, Rome, Londres et finalement New York (1964).

Depuis Dialogues des Carmélites revient régulièrement sur les scènes françaises, mais une inflation soudaine en propose en un trimestre trois productions signées Mireille Delunsch, Christophe Honoré puis, en décembre, Olivier Py au Théâtre des Champs-Elysées - nous y reviendrons.

Si l’on a déjà vu la régie de Mireille Delunsch à Bordeaux - Michel Le Naour vous a dit tout le bien qu’il en pensait dans ces mêmes colonnes - il faudra retourner à Nantes ou Angers, coproducteur du spectacle, pour y entendre une nouvelle distribution qui promet beaucoup : la Blanche d’Anne-Catherine Gillet (photo), la Première Prieure de Doris Lamprecht, Hedwige Fassbaender en Mère Marie de l’Incarnation, quel trio ! Et l’on guettera côté messieurs le Chevalier de la Force de Stanislas de Barbeyrac, tous sous la direction experte de Jacques Lacombe.

A l’Opéra de Lyon, Christophe Honoré signera sa première mise en scène lyrique, relevant le défi d’un ouvrage appelant avant tout une direction d’acteur au cordeau. On est très curieux de son travail autant que de l’équipe de chant finement assemblée par Serge Dorny : Helène Guilmette en Blanche, Sébastien Guèze en Chevalier, Sabine Devieilhe, hier transcendante Reine de la Nuit dans le même théâtre pour Sœur Constance, Kazuchi Ono de plus en plus à l’aise dans l’opéra français comme l’a prouvé son récent doublé Ravel à Glyndebourne. Mais celle dont on espère le frisson le plus terrible, c’est bien Sylvie Brunet. On croit déjà entendre l’agonie de Madame de Croissy.

Jean-Charles Hoffelé

Poulenc : Dialogues des Carmélites
Les 11, 14, 16, 18, 20, 24 et 26 octobre 2013
Lyon – Opéra

15, 17, 20 octobre, 5 et 7 novembre 2013,
Nantes, Théâtre Graslin
15 et 17 novembre 2013
Angers - le Quai

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Photo : Dolorès Marat
 

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