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Concerts des ensembles EEEmerging+ au festival d’Ambronay 2021 – Flûte et reflûte – Compte-rendu

Depuis une quinzaine d’années, le festival d’Ambronay est l’un des partenaires du projet Emerging European Ensembles, « EEEmerging+ » pour les intimes, et soutient donc par le biais de résidences quantité de jeunes ensembles  spécialisés dans la musique ancienne, issus de toute le Vieux Continent. Cette fois, pour sa 42e édition, le festival proposait d’entendre tous ces ensembles au cours de son dernier week-end
 Le vocable « musique ancienne » est pris dans un sens très large, puisque la dizaine d’ensembles retenus couvrent un répertoire allant du Moyen Âge jusqu’à la fin du XVIIIsiècle. De manière assez exceptionnelle, les musiciens français sont très présents cette année, avec pas moins de trois ensembles, les autres venant d’Italie, d’Allemagne, de Grande-Bretagne, d’Espagne ou des Pays-Bas.

Into the Winds
Par-delà cette diversité, un point est commun à beaucoup de ces formations : les vents sont particulièrement bien représentés dans l’édition 2021, le nom même de certains ensembles annonçant d’emblée la couleur, comme « Into the Winds » (photo), ensemble français comme son nom ne l’indique pas, « Sarbacanes », également constitué d’instruments à vent, ou même « Palisander », puisque c’est en bois de palissandre que sont encore aujourd’hui fabriquées la plupart des flûtes à bec. Chalémies et sacqueboutes, marches ou musiques à danser, assaisonnées de quelques pièces religieuses, tel est le programme que propose « Into the Winds », à travers une évocation de quatre villes au XVsiècle : Paris, Bruges, Florence et Amboise, les morceaux étant introduits par une évocation contemporaine des lieux en question, signée Machiavel ou Commynes.
 

Ensemble FiloBarocco © Bertrand Pichène

Palisander
Instruments de taille variable, du minuscule piccolo et à la gigantesque flûte contrebasse (deux mètres de hauteur environ), sans oublier quelques grelots aux chevilles pour danser la tarentelle, l’ensemble britannique « Palisander » revendique le grand écart entre le répertoire médiéval et les musiques populaires, sans se priver de transcrire pour vents des pièces d’autres traditions encore, de quoi attiser la curiosité autour de leur prochain projet, autour de la magie et de la sorcellerie.
 

Ensemble Sarbacanes © Bertrand Pichène

Sarbacanes
Mozart et rien que Mozart au programme pour « Sarbacanes », avec des pages directement écrites pour octuor de vents comme la Sérénade K. 388, ou des transcriptions, tantôt d’époque, comme l’ouverture de Don Giovanni arrangée jadis par Josef Triebensee, tantôt modernes, les membres de l’ensemble se chargeant eux-mêmes, non sans brio, de transformer pour leurs instruments des partitions mozartiennes qui ne leur étaient pas a priori destinées.
 

Ensemble Cembales © Bertrand Pichène

CaladriusfiloBarocco - Cembales
Les flûtes – car il en est de toutes les tailles, on l’a dit, mais aussi de toutes les formes – sont aussi mises en avant par d’autres formations. C’est le cas de l’ensemble allemand « Caladrius », où la flûte est chargée de la mélodie, les trois autres instrumentistes assurant le continuo, ou de l’ensemble italien « filoBarocco », avec dans les deux cas une flûtiste aux pieds nus, le contact direct avec le sol favorisant peut-être l’interprétation. Deux flûtistes, chaussés mais très allègres, pour l’ensemble allemand « Cembaless », qui cèdent parfois le premier plan à une soprano.

La Palatine
Car on chante aussi, parmi les EEEmerging+, comme l’indique le nom de l’ensemble espagnol « Cantoría ». On y chante magnifiquement, c’est le cas avec l’ensemble La Palatine, dont la soprano Marie Théoleyre produit forte impression par sa science de la déclamation et son investissement dramatique, dans un programme à base de pièces plus ou moins légères du Seicento : Domenico Mazzocchi, Tarquinio Merula et, inévitablement, Monteverdi pour un superbe Lamento d’Arianna, et même « Il n’y a pas d’amour heureux » de Brassens en bis, entorse bien pardonnable à la règle de la musique ancienne...

Laurent Bury

42e Festival d’Ambronay – 1er et 2 octobre 2021

Photo © Bertrand Pichène

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