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Compte-rendu : Youri Temirkanov dans son arbre généalogique

Le dernier concert du cycle « Ballets russes » au Théâtre des Champs-Elysées sous la direction de Youri Temirkonov à la tête de son Orchestre Philharmonique de Saint-Pétersbourg est, comme l’écrivait Tchaïkovski : « Russe jusqu’à la moelle des os ». Si Stravinski a montré son indépendance vis-à-vis de son pays d’origine à partir de la Révolution bolchévique, il n’en est pas moins le produit d’une culture qui s’exprime dans le caractère de L’Oiseau de feu (si proche de Rimski-Korsakov) et de Petrouchka (malgré les emprunts à l’Occident).

A la tête d’une phalange somptueuse, Temirkanov plonge avec L’Oiseau de feu jusqu’aux tréfonds de l’âme slave et manifeste un chatoiement de couleurs, une attention aux détails, une lisibilité des plans sonores qui vont de pair avec le sens de la ligne. Son interprétation de Petrouchka prend ses distances par rapport à des conceptions plus intellectuelles et raffinées pour trouver, sous une direction élégante et précise, la veine populaire et l’élan narratif. L’humour et surtout le sens du drame jaillissent à tout moment dans les avatars du Pantin, et les musiciens de la Philharmonie de Saint-Pétersbourg (le trompettiste possède l’acidité si caractéristique de ses vents) nous font redécouvrir une partition ancrée dans le folklore russe.

Soliste du Concerto n°2 de Prokofiev, Sergei Krylov (qui remplace Julia Fisher) manifeste une grande finesse d’approche, et son archet souple - il est le disciple de Salvatore Accardo -sait se mouler dans les arcanes lyriques et rythmiques d’une œuvre qui demanderait peut-être plus d’agressivité et de mordant. Virtuose, presque fantasque, son bis (une version pour violon de la Toccata et Fugue en ré mineur de J-S. Bach) témoigne de sa maîtrise et de son aisance stylistique. Pour conclure, les indémodables extraits du final de Casse-Noisette de Tchaïkovski et des Variations Enigma d’Elgar (le fameux Nimrod) enthousiasment un public conscient d’avoir vécu un grand moment de musique.

Michel Le Naour

Paris, Théâtre des Champs-Elysées, 28 novembre 2009

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Photo : DR
 

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