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Compte-rendu : Reine du Comique - The Fairy Queen à l’Opéra Comique

Un cabinet de curiosités dans lequel la nuit de Titania et d’Oberon déploiera ses sortilèges célestes et pour les mortels, ses confusions, voici la jolie idée que Paul Brown offre à Jonathan Kent. Celui-ci n’a plus qu’à y faire donner son théâtre virtuose et le tour est joué, mais pas tout à fait jusqu’au terme.

La troupe des acteurs est de bout en bout formidable – avec une mention spéciale pour l’Oberon patient et implacable de Finbar Lynch et le Lysander idéalement juvénile de Nicholas Shaw et sans oublier le Robin joliment balancé de Jothan Annan – mais les treize chanteurs sont assez loin de les égaler, sinon Lucy Crowe, formidable Junon et Andrew Foster-Williams, dont l’Hiver tremblé et l’Hymen furibond sont presque déjà anthologiques (ajoutons la Plainte d’Emmanuelle de Negri, tendrement chorégraphiée).

Hors pour Fairy Queen (et ce qu’il y reste de Shakespeare, adieu Hippolyte), Purcell a composé probablement sa plus belle partition du moins pour le genre du semi-opéra ; la musique s’y dresse sans discontinuer à autant de sommets, les exigences sont donc cruelles. Mais sur ces matières vocales un peu pauvres ou souvent simplement trop vertes, William Christie dispense ses chamarrures et ses mouvements avec un art incontestable du faste et de l’entrain, qui cependant reste sourd à la mélancolie : sa direction alerte et pleine d’esprit ne sait pas suspendre le temps, vertu purcellienne s’il en est, et lorsque la poésie, pourtant flagrante, paraît, elle semble la voir à peine.

En fait le spectacle est dévoré par le théâtre, c’est lui qui mène la danse. Jonhatan Kent n’évite pas certaines facilités : les artisans sont évidemment de notre siècle et les divertissements font des clins d’œil en dessous de la ceinture (les lapins, fatal), ce mélange des époques en ajoute encore dans le côté foutraque, mais l’on rit de bon cœur.

Pourtant cette lecture qui veut toujours se garder dans le divertissement ne dit certainement pas tout de ce qu’est Fairy Queen, et principalement de son art du merveilleux, l’un des signes du temps. Mais l’on glose, l’on regrette des chimères peut-être, en attendant et sans vous tenir à nos atermoiements, allez voir cette formidable soirée de théâtre qui vous tiendra quatre heures durant les yeux grands écarquillés. Elle a déjà réjoui Glyndebourne et devrait probablement connaître une édition DVD.

Jean-Charles Hoffelé

Henry Purcell/Thomas Betterton : The Fairy Queen - Opéra Comique, le 16 janvier, puis les 18, 19, 21, 22 et 24 janvier 2010

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Photo : DR
 

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