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Compte-rendu - L’orgue de Benjamin Alard : des promesses aux fruits


Premier Prix, voici cinq ans, au prestigieux Concours international de clavecin de Bruges, Benjamin Alard rêve de plus en plus, semble-t-il, à une carrière à deux dimensions, où les prouesses de l’organiste s’ajouteraient à celles du virtuose de l’instrument à sautereaux.
Toujours est-il que sur l’orgue de Saint-Louis-en-l’Ile construit en 2002 par Bernard Aubertin– un instrument qui actualise d’ heureuse façon l’esthétique de l’école germanique de l’âge d’or - il vient de confirmer de séduisantes affinités avec Bach le père, figure de proue d’un récital où l’exception tenait dans trois brèves variations sur le choral Ach Herr, mich armen Sunder, demandées à l’inventif Johann Christoph Bach (vers 1643-1703) ; sans doute le nom le plus important de la dynastie avant l’avènement du Cantor.

A l’évidence, tous les dons (ou presque) ont été offerts en partage à notre maître de tribune. Et d’abord, une agilité sans faille qui triomphe dès le portique liminaire du Prélude et Fugue en la mineur BWV 543, cependant que les emprunts au petit livre des chorals Schübler – où le Choral du Veilleur tourne à l’hymne évangélique - rayonnent d’une vraie grâce intérieure.

Certes, il arrive que de petits nuages ombrent çà et là notre bonheur d’écoute, comme dans la Fugue en sol mineur BWV 578, où le souci formaliste est (trop) apparent.
Mais l’emblématique Passacaille et Fugue en ut mineur BWV 582 conclut le concert en apothéose, vision cosmique qui marie dans un crescendo implacable élan dynamique et ferveur mystique. Un monument d’émotion étreint ici, que le surprenant Benjamin Alard (24 ans) construit en grand architecte. Après la percée du claveciniste, on a plaisir à saluer l’émergence de l’organiste dans une perspective œcuménique qui séduira luthériens et latins.

Roger Tellart

Eglise Saint-Louis en l’Ile, 5 juillet 2009

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Photo : DR

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