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Compte-rendu - Ingo Metzmacher et Waltraud Meier - Une expression noble et souveraine


Ingo Metzmacher est sans doute l’une des baguettes les plus assurées et les plus fiables que l’on puisse entendre. Pourtant, sa réputation dans l’Hexagone n’est pas encore à la hauteur de son talent. Nommé en 2007 à la tête du Deutsches Symphonie Orchester Berlin (l’une des formations les plus accomplies d’Outre-Rhin), il présente un programme dense qui, de Claude Debussy à Richard Strauss en passant par Richard Wagner et Gustav Mahler, pose peu ou prou la question de la remise en cause de la tonalité.

La Mer présente sous sa direction claire et presque neutre un caractère plus ouvertement moderne qu’impressionniste, au détriment des couleurs et de l’élan. Dans une certaine mesure, l’exécution cohérente mais frustrante prend au pied de la lettre le sous-titre d’« esquisses symphoniques » voulu par Debussy tout en gommant l’énergie et la mobilité de cette partition flamboyante.

Remplaçant Deborah Voigt souffrante, Waltraud Meier irradie ensuite de son chant extatique, incomparable de tenue vocale, cette Mort d’Isolde qu’elle a portée jusqu’à l’extase sur les plus grandes scènes. Après l’entracte, l’Adagio de la 10e Symphonie de Mahler pris dans un tempo relativement lent voit Metzmacher tout aussi à l’aise et idiomatique que son maître Michael Gielen dans cette même œuvre. Sens de la respiration, de la pulsation, de l’équilibre prévalent dans une interprétation soutenue par une qualité d’émotion lancinante et mortifère.

Concentré, chaque pupitre de l’orchestre fait preuve d’une perfection qui se vérifie dans l’accompagnement des Quatre derniers lieder de Richard Strauss où les instrumentistes solistes (le violon de Wei Lu, la perfection chambriste des cors ou de la flûte, la profondeur des cordes…) font corps avec la voix de Waltraud Meier peut-être moins pure et subtile que celle de Schwarzkopf, Janowitz ou Kiri Te Kanawa, mais d’un modelé expressif souverain qui soulève l’enthousiasme du public.

Michel Le Naour

Paris, Salle Pleyel, 24 juin 2009

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Photo : DR

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