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Compte-rendu - Idomenée à Nancy - Noir c’est noir
L’Opéra National de Lorraine reprend la production de l’Idoménée de Mozart dans la mise en scène de Yannis Kokkos, co-produite avec l’Opéra national de Bordeaux. Un immense cube noir sert de cadre au drame et seules trois colonnes, pivotant de cour à jardin, permettent de styliser les divers lieux de l’action. Des éclairages rasants plongent l’oeuvre dans une mystérieuse – mais au bout du compte excessive - noirceur. Egalement signés Yannis Kokkos, les costumes ne nous épargnent pas les poncifs traditionnels (le blanc pour Ilia et le rouge pour Electre) et la direction d’acteurs pèche par son statisme prononcé.
La partition choisie mélange les versions munichoise et viennoise et confie à un ténor le personnage d’Idamante. Cette option retenue, pourquoi ne pas conserver le Rondo « Non temer amato ben » K.490 avec violon obligé, qui confère plus de poids au personnage d’Idamante, plutôt que la scène traditionnelle avec l’aria d’Arbace, bien plus faible sur le plan dramatique ? Et surtout pourquoi supprimer le chœur final du premier acte, ce qui déséquilibre l’enchaînement avec le II ?
La distribution nancéenne réunit un quatuor de ténors de tout premier ordre. Chad Shelton endosse les habits d’Idoménée avec un art subtil des demi-teintes et une vocalisation idéalement illustrée par un « Fuor del mar » (version longue) où le tourment de la faute transpire de chaque note. Superbe de force et d’intensité !
Frédéric Antour incarne un Idamante profondément humain et la splendeur de son timbre le dispute à l’élégance d’une ligne de chant savamment conduite. Finesse, élégance et rondeur distinguent le splendide Arbace de Jésus Garcia, tandis qu’Alexandre Swan est un Grand Prêtre au timbre mordant.
Judith Van Wanroij campe une lumineuse Ilia au moyen d’une voix fraîche au phrasé impeccable et aux aigus brillants et radieux. L’émotion palpable de la salle lors de ses deux airs (« Padre, germani, addio ! » et « Se il padre perdei ») vaut tous les compliments…
D’une voix incisive Marina Rebeka trace un portrait fouillé d’Electre ; la noirceur d’âme du personnage transparaît avec force et brio dans sa grande scène avec récitatif accompagné (« d’Oreste e d’Aiace ») qui soulève l’enthousiasme de la salle.
On ne manquera pas de saluer la prestation des Chœurs de l’Opéra national de Lorraine unis à ceux d’Angers Nantes Opéra et admirablement préparés par Merion Powell ; ils allient homogénéité des pupitres et musicalité sans faille. A la baguette, Kirill Karabits obtient de savoureuses couleurs de l’Orchestre symphonique et lyrique de Nancy et défend une conception contrastée, vive et acérée.
Bernard Niedda
Mozart : Idoménée. Nancy, Opéra National de Lorraine, le 19 juin, puis les 22, 24, 26 et 28 juin 2009
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Photo : DR
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