Journal

Compte-rendu - Emmanuel Krivine dirige la 9e Symphonie de Beethoven - Retour aux sources


Depuis la création de la Chambre Philharmonique en 2004, que de chemin parcouru par Emmanuel Krivine à la tête de cet ensemble destiné à retrouver les sensations musicales des origines ! A la Cité de la musique, le chef et ses musiciens s’attaquent à un monument de la littérature : la Neuvième Symphonie de Beethoven qui, trop longtemps, est restée l’apanage d’exécutions impressionnantes mais stylistiquement discutables héritées du wagnérisme et des cathédrales symphoniques brucknériennes dont Furtwängler ou Karajan furent les hérauts. Fort de la remise en cause entreprise par les « baroqueux », Krivine, à sa manière, réussit à tirer son épingle du jeu, se rapprochant des tempi rapides et métronomiques choisis par Beethoven.

Ce traitement a ses avantages (il évite une grandeur emphatique de l’Allegro initial qui devient proche du début de La Création de Haydn et gagne en individualisation des pupitres et en qualité d’écoute), mais aussi ses inconvénients (le scherzo Molto vivace, malgré sa rapidité, ne semble pas progresser en dépit de la pulsation de la timbale ; l’Adagio bénéficie de l’allant de la direction mais oublie la tension expressive au profit d’une ligne sans pathos mais un peu frustrante). Le grand portique qui ouvre le final file droit son chemin mais doit attendre l’intervention très sûre de la basse Konstantin Wolff pour prendre son envol. Le reste du mouvement s’inscrit plus dans l’esprit des Lumières que dans la dimension métaphysique : le remarquable chœur Les Eléments de Joël Suhubiette contribue à la réussite de l’Hymne à la joie, autant que le quatuor vocal (excellente intervention de la soprano Sinéad Mulhern ou de la mezzo-soprano Carolin Masur) et l’engagement de la Chambre Philharmonique unie sous la baguette inventive de Krivine.

Peut-être la Neuvième Symphonie résiste-t-elle plus que d’autres à ce traitement radical, mais l’aventure, malgré ses imperfections, mérite incontestablement d’être vécue.

Michel Le Naour

Paris, Cité de la musique, 6 juin 2009

> Lire les autres articles de Michel Le Naour

Photo : DR

Partager par emailImprimer

Derniers articles