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« Rita, elle est pas belle la vie ? » à la Péniche Opéra - Zinc lyrique - Compte-rendu

L’année du 30e anniversaire de la fondation de la Péniche Opéra démarre en beauté. On ne se faisait aucune inquiétude quant à la reprise de Rita ou le mari battu de Donizetti par le même trio que celui réuni en 2010 au Théâtre de Fontainebleau. Avec raison. Amira Selim (Rita), Christophe Crapez (Peppe) et Paul-Alexandre Dubois (Gasparo) possèdent la fois la voix et le tempérament requis pour faire pétiller la savoureuse farce donizettienne dans les effluves de vin chaud qui baignent la plus intimiste scène lyrique de Paris. Formidables comédiens, les trois interprètes tirent le meilleur parti de la mise en scène vivante et citronnée de Mireille Larroche – l’intrusion des Chaussette noires via le juke box du café tenu par Rita n’en étant pas le moment le moins réussi – sur l’accompagnement plein de charme d’un piano droit sur lequel officie Caroline Dubost.

Placé en seconde partie de soirée, le « demi-opéra » Elle est pas belle la vie ? de Vincent Bouchot fait suite aux Cantates de bistrot d’après les fameuses Brèves de comptoir de Jean Marie Gourio, création très applaudie à la Péniche en 2005. On pouvait se demander si le compositeur parviendrait à renouveler la réussite de son précédent opus dans une réalisation elle aussi nourrie des perles collectées par J.M. Gourio. La réponse est sans l’ombre d’une réserve oui. Avec seulement deux personnages masculins (Christophe Crapez en tenancier de bar et Paul-Alexandre Dubois en client alcoolique scotché au zinc) et une tardive apparition d’une femme symbole d’un rêve inaccessible, idéalement incarnée par Amira Selim - dont, des coulisses, les mélopées sans paroles sont auparavant venues se mêler l’action - la nouvelle partition de Bouchot présente un profil plus intimiste que la précédente.

Action, ou non-action plutôt, alimentée par l’intrusion de ce que le metteur en scène Alain Pattiès définit comme un « personnage à part entière » : la télévision. Un écran plat au-dessus du bar sur lequel une chaîne d’information continue déverse à flot, mais de façon muette, les images de catastrophes naturelles, attentats, guerres, etc. Le son n’intervient que pour une séquence sur la politique française ; moment assez gratiné accompagné par une grinçante parodie du Prélude « Les sons et les parfums tournent dans l’air du soir » de Debussy. On retrouve sinon une couleur musicale assez proche des Cantates de bistrot dans un ouvrage inclassable que Christophe Crapez et Paul Alexandre Dubois portent en faisant corps jusqu’au vertige avec son univers. Un beau moment de théâtre musical - et une pénichopéraesquissime soirée !

Alain Cochard

Donizetti/Vincent Bouchot : « Rita, elle est pas belle la vie ? » - Paris, Péniche Opéra, 14 janvier 2012, prochaines représentations les 24, 25 janvier et 5 février 2012. www.penicheopera.com

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Photo : DR
 

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