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Nicolas Chalvin dirige l’Orchestre des Pays de Savoie à la Grange au Lac - Cordes en fête - Compte-rendu

Dernier d’une série de neuf dates commencée l’été dernier, le concert dirigé par Nicolas Chalvin (photo) à la Grange au Lac d’Evian, avec pour solistes Bertrand Chamayou et Romain Leleu, a permis à l’Orchestre des Pays de Savoie et à son directeur musical de faire d’une pierre deux coups. Cet original programme Elgar, Chostakovitch, Neruda, Dvorak constituait en effet le premier des quatre concerts de l’OPS cette saison dans le cadre de « Musique à la Grange au Lac » et s’inscrivait en outre parmi les nombreuses initiatives suscitées par «Orchestres en fête ».

Programme pour cordes : celles de l’Orchestre des Pays de Savoie (une formation Mozart) font honneur au travail de fond mené depuis 2009 par son chef. La Sérénade d’Elgar placée en ouverture montre une fluidité et une élégance qui traduisent le chic délicat de cet opus.

Au piano, comme à la trompette, le meilleur de la jeune génération française rejoint ensuite les instrumentistes savoyards pour le 1er Concerto op. 35 de Dimitri Chostakovitch. Facile de céder à la dispersion et au clinquant ici ; c’est tout le contraire que proposent Chamayou et Leleu sous la baguette vigilante de Nicolas Chalvin. La complicité qui règne entre les protagonistes, la concentration du propos se soldent par une interprétation où la vélocité ironique des mouvements vifs, tout comme la subtilité des coloris du Lento rendent justice à une partition qui souffre parfois d’approches univoques et excessivement pressées.

Compositeur tchèque comme son patronyme ne le laisse pas imaginer, Johann Baptist Georg Neruda (1708-1780) est d’abord connu pour un Concerto pour trompette et orchestre en mi bémol majeur que Romain Leleu donne en début de seconde partie. La maîtrise du souffle, la souplesse avec laquelle le soliste déploie et nuance la ligne mélodique forcent l’admiration. Technique éblouissante certes, mais ce sont d’abord le charme et le lyrisme qui singularisent cette approche très poétique, portée par un orchestre plein de tact.

Enchaînement logique, Dvorak suit avec la Sérénade pour cordes en mi majeur op. 22 - comme cette musique est à sa place dans le cadre étonnant de la Grange au Lac (une salle « à la russe », toute en bois, que l’industriel et mécène Antoine Riboud avait fait construire pour Rostropovitch) ! Lyrisme d’un naturel et d’une simplicité parfaite du Moderato, fraîcheur un brin coquine du Tempo di valse, vigueur sans précipitation du Scherzo, atmosphère nocturne et parfumée du Larghetto, vitalité radieuse du final : tout y est ! Après une chaleureuse ovation du public, le mot de la fin revient à Janacek avec l’Adagio de la Suite pour cordes que Nicolas Chalvin et ses musiciens restituent avec une secrète ferveur (mention spéciale au violoncelle racé de Noé Natorp !).

Un peu avant le concert du soir, on a pu assister, toujours à la Grange au Lac, à une prestation du Jeune Orchestre à cordes des élèves des écoles de musique du Chablais. Le pages de Grieg (Deux mélodies élégiaques) et de Cyrille Lehn (Quatre danses pour orchestre à cordes) qu’ils interprètent sont le résultat d’un travail de longue haleine coordonné par Nathalie Retsin. En tête de chaque pupitre on trouve un membre de l’Orchestre des Pays de Savoie et tous les – parfois très jeunes ! - musiciens en herbe qui les entourent ont à cœur de se montrer digne du privilège de se produire dans une tel lieu sous la baguette de Nicolas Chalvin, dont l’attachement à la mission régionale de sa formation n’est plus à démontrer.

Alain Cochard

Evian, Grange au Lac, 23 novembre 2013

Photo : Gislain Mirat 

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