Journal
Maya Villanueva, Patrice Langot & Romain David interprètent Ginastera – Le Disque de la Semaine
Alberto GINASTERA (1916-1983) : 2 Canciones op. 3, 5 Canciones populares argentinas op. 10, Las horas de una estancia op.11, Pampeana op. 21 n° 2 pour violoncelle et piano, Sonate pour violoncelle et piano op. 49 // Gabriel SIVAK (né en 1979) : Tres instantes oníricos pour soprano, violoncelle et piano / 1 CD Klarthe K016, dist. Harmonia Mundi (parution le 25 novembre)
En concert comme au disque, le centenaire de la naissance d’Alberto Ginastera (1916-1983) n’aura guère été célébré en France ; autant dire que l’enregistrement de Maya Villanueva (soprano), Patrick Langot (violoncelle) et Romain David (piano) tombe à pic. Le pianiste était absent des studios depuis trop longtemps, mais on n’a pas oublié la réussite d’un récital Chopin/Scriabine (Loreley) ou d’une intégrale de la musique pour violon et piano d’Olivier Greif avec Stéphanie Moraly (Triton), ni une admirable version des Quintettes de Franck et Fauré (Loreley) au sein de l’Ensemble Syntonia - fondé en 1999 par R. David et des amis musiciens rencontrés au CNSMD de Paris.
(de g. à dr. ) Romain David, Maya Villanueva et Patrice Langot © Klarthe
Ginastera : El árbol del olvido op. 3 n° 1 (ext.)
Rien étonnant donc à ce que Patrick Langot, le violoncelliste de Syntonia, côtoie Romain David sur ce CD Ginastera. Il constitue d'ailleurs une intégrale de l’œuvre pour violoncelle et piano de l’Argentin, puisque sa production pour ces deux instruments réunis se limite à deux opus (21 n°2 & 49) soit moins d’une trentaine de minutes de musique au total.
Ginastera : La mañana, n° 2 de La horas de une estancia, op. 11 (ext.)
Deux intégrales en une même car, avec les trois recueils interprétés par la soprano Maya Villanueva, on dispose de la totalité des réalisations pour voix et piano de Ginastera et, au bout d’un compte, d’un disque aussi original que dépaysant, gorgé de couleurs, de soleil, de rêve et de lyrisme.
Les mélodies op. 3(1938), 10(1943) et 11(1943) s’inscrivent dans la période dite «nationaliste » du compositeur, marquée une forte influence de la musique populaire argentine (elle-même nourrie des apports des divers mouvements d’immigration survenus au cours du XIXe siècle), et sont autant de pièces soigneusement serties et puissamment évocatrices (que de vastes horizons Las horas de una estancia ouvrent-elles à l’imagination...).
Maya Villanueva possède une chaleur du timbre et un sens de la ligne remarquables (ils s’affirment dès la prégnante Canción al árbol del olvido op. 3 n° 1) mais aussi, atouts non moins précieux, une qualité et une rapidité de diction qui lui permettent de « croquer » – dans les deux sens du mot -– des miniatures telle que Chacarera ou Gato (nos 1 et 5 des Canciones populares argentinas). Conteuse autant que chanteuse, elle peut continûment compter sur l’attention vigilante et la vaste palette sonore de Romain David dont le jeu apporte beaucoup à la caractérisation de chaque morceau.
Ginastera : Sonate op. 49 - 1er mvt Allegro deciso (ext.)
Ginastera : Sonate op. 49 - 2ème mvt Adagio passionato (ext.)
Ginastera : Sonate op. 49 - 4ème mvt Allegro con fuoco (ext.)
On n’apprécie par moins le pianiste dans Pampeana op. 21 n° 2 (1) et dans la vaste et trop rare Sonate pour violoncelle – deux œuvres que presque trois décennies séparent. L’archet généreux, la sonorité pleine, riche, âpre et la rauque aussi lorsque l'expression le réclame, de Patrick Langot trouvent un terrain d’expression rêvé dans ces pages. Très narrative, Pampeana séduit immédiatement. La Sonate, engagée, fougueuse et secrète (superbe et étonnant Adagio passionato !) tient en haleine jusqu'à la rageuse et dansante explosion de son Allegro con fuoco conclusif.
Gabriel Sivak : De los álamos ; n° 2 des Tres instantes oníricos (ext.)
Dans le droit fil de ce qui a précédé, les Tres instantes pour soprano, violoncelle et piano (2016) du jeune Argentin Gabriel Sivak (né en 1979) concluent en beauté avec un mélange d’onirisme, d’étrangeté (le n° 2, De los álamos, fait appel à l’électronique) et d’élan et réunissent trois interprètes que l’on retrouve en concert le 24 novembre, à Paris salle Cortot, lors d’une soirée organisée par le label Klarthe. La pianiste Hélène Tysman y prend part aussi puisqu’elle signe un album Ravel (à paraître début décembre) chez le même éditeur
Alain Cochard
(1) Pampeana op. 21 n° 1 a été écrit pour violon et piano
Maya Villanueva (soprano), Patrick Langot (violoncelle), Romain David (piano) et Hélène Tysman (piano)
Œuvres de Ginastera, Sivak & Ravel
24 novembre - 20h 30
Paris – Salle Cortot
sallecortot.com/concert/ginastera__ravel_de_paris_a_buenos_aires.htm?idr=6103
le disque de la semaine 6789
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