Journal

Mark Padmore et Till Fellner interprètent le Winterreise - Humilité poétique - Compte-rendu


Voici un Winterreise offert comme un pur joyau, dont le souvenir s’inscrit dans la mémoire. De l’adieu à l’aimée jusqu’à la compassion pour le musicien jouant tout seul de son orgue de barbarie, pieds nus dans la neige, au cours de ces vingt-quatre Lieder, les deux immenses artistes que sont Mark Padmore (photo ci-dessus), un ténor comme le voulait Schubert, et Till Fellner, ne nous lâchent pas, nous font faire ce voyage existentiel sur le ton de la confidence ; confidence déchirante, parfois insoutenable, qui ne laisse pas indemne.


A chaque Lied, il s’agit d’aller jusqu’au bout de soi-même et le chanteur se livre complètement. Doucement, souvent pianissimo, sobrement, le chant monte tandis que le clavier lui parle à son tour. Le jeu de Fellner (photo) est bien autre chose qu’un accompagnement. Padmore sait l’écouter, dans les miroitements de chaque note. Et puis, avec Fellner, le rythme est présent, régulier à l’extrême. Alors, on entend les silences et l’implacable mesure du pas du voyageur face à son destin.

La voix si douce et faussement fragile, qui, humblement, prend le risque de ne pas briller, sait faire naître les larmes jusque dans Nacht und Traüme D.827, page splendide offerte en bis. Fellner, qui s’est révélé avec les sonates de Beethoven, se montre, là encore, un partenaire merveilleux comme à Salzbourg l’été passé, en trio avec Adrian Brendel et Lisa Batiashwilli. On retrouvera le pianiste en janvier (les 11 et 12), salle Pleyel, avec l’Orchestre de Paris et Herbert Blomstedt dans le 4ème Concerto de Beethoven, avant qu’il ne prenne une année sabbatique. A ne pas manquer donc !

Françoise Ferrand

Paris, Salle Gaveau, 28 novembre 2011

> Programme détaillé et réservations de la Salle Gaveau

> Vous souhaitez répondre à l’auteur de cet article ?

> Lire les autres articles de Luc Hernandez

Photo : Marco Borggreve / Jean-Baptiste Millot

Partager par emailImprimer

Derniers articles