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Louis Langrée dirige Pelléas et Mélisande au TCE - Sommet debussyste - Compte-rendu
Après avoir « redécouvert » Debussy à l'aune des préceptes « d’époque », certes passionnants, défendus par Marc Minkowski (à Moscou en 2007 dans la production d'Olivier Py) et par John Eliot Gardiner (au Comique l'an dernier avec Stéphane Braunschweig), retrouver cette partition dans toute son ampleur, goûter à l'ivresse de ses sonorités larges et profondes, se laisser bercer par ses vibrations incessantes sous la direction de Louis Langrée à la tête de l’Orchestre de Paris procure un bonheur indicible. Particulièrement à l'aise dans cette œuvre aux milles visages, le chef français livre une leçon d'élégance et de style, allégeant les textures, déployant ici de capiteux accents, soulignant là quelques efflorescences impressionnistes, qui inspireront aussi bien Puccini (chœur à bouche fermée de Madama Butterfly), que Ravel (Daphnis et Chloé). Proche de cette musique envoûtante où s'enchâssent effets minimalistes et fulgurances extrêmes, Langrée déroule un somptueux tapis sonore qui accompagne chaque étape du drame avec une acuité infinie.
Le travail accompli avec les instrumentistes est tout aussi poussé que celui réalisé avec les chanteurs qui épousent sans restriction cette conception très personnelle. Réunis à plusieurs reprises dans Hamlet d'Ambroise Thomas, le couple Simon Keenlyside-Natalie Dessay récidive dans Pelléas et Mélisande. Toujours aussi investi, juvénile de timbre et vif de voix, le baryton britannique a fait une nouvelle fois valoir ses qualités d'interprète, uniques, dans un français des plus châtié, exploit d'autant plus remarquable que le chanteur avait laissé un souvenir impérissable dans la production de Bob Wilson, sur la scène de la Bastille en 2004.
Natalie Dessay n'a sans doute pas une voix « qui vient du bout du monde », mais sa Mélisande souriante, pleine de réserve et de douceur s'apparie justement à son partenaire et offre une séduisante alternative à sa prestation scénique captée à Vienne en 2009 (DVD Virgin). Comme avec Bernard Haitink (Naïve TCE 2000) et Bertrand de Billy à Vienne avec Laurent Pelly, Laurent Naouri n'incarne pas Golaud ; il l'est, jusque dans ses débordements qui sont comme autant de fêlures, impardonnables, mais tristement humaines. A ses côtés Alain Vernhes dispense un chant dépouillé aux sagesses d'Arkel, Marie-Nicole Lemieux apportant sa vivacité à Geneviève, Khatouna Gadelia sa légèreté au petit Yniold et Nahuel di Pierro sa sombre élocution au Berger et au Médecin. Une fois encore l'excellence est de mise au TCE.
François Lesueur
Debussy : Pelléas et Mélisande (version de concert) – Paris, Théâtre des Champs-Elysées, 17 avril 2011
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Photo : DR
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