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Les frères Pati, Golda Schultz et les Frivolités Parisiennes au Théâtre des Champs-Elysées – Esprit de famille - Compte-rendu
Dans la famille Pati, on connaissait surtout le grand frère : Pene. Mais son cadet, Amitai, fait lui aussi partie des ténors qui comptent aujourd’hui. Peu habitués à se retrouver sur une même scène, les livrets d’opéra étant rarement écrits pour deux ténors, les chanteurs samoans ont imaginé un récital haut en couleur. Et qui dit ténor, dit soprano : la Sud-africaine Golda Schultz faisait également partie de la fête, tous accompagnés par l’orchestre des Frivolités Parisiennes dirigé par la Français Quentin Hindley.
C’est à Pene Pati d’ouvrir le ban avec Puccini avec l’ardent « Recondita armonia » (Tosca) ; le timbre lumineux et solaire n’est pas sans rappeler un certain Pavarotti … Puis Golda Schultz entonne « Chi il bel sogno di Doretta », l’air de Magda dans La Rondine du même Puccini. Les sons filés qu’elle glisse avec soin démontrent toute sa virtuosité.
Très italien, le programme se poursuit avec Donizetti. Le duo comique « Lallaralla » de L’Elisir d’amore témoigne d'une belle complicité entre la soprano et Amitai Pati. On tend davantage l’oreille lorsque ce dernier se lance dans le célèbre « Una furtiva lagrima » : la ligne de chant se déploie élégamment, avec une voix plus légère que celle de Pene. Le solo de basson qui ouvre cet air, nous rappelle que l’orchestre est un personnage clé de cette soirée grâce à la belle sonorité de Benjamin El Arbi, l’un des deux fondateurs des Frivolités Parisiennes (avec le clarinettiste Mathieu Franot).
Golda Schultz © Vittorio Greco
Golda Schultz incarne ensuite Micaela, un de ses rôles fétiches actuellement ; nous l’y avions d’ailleurs entendue en 2022 sur le plateau de l’Opéra Bastille. La voix est claire mais nécessiterait une diction plus ciselée, contrairement au Don José de Pene Pati dont chaque syllabe se révèle d’une parfaite netteté – un régal ! Sa « Prière » de Robert le Diable (Meyerbeer) achève de convaincre le public.
Il aura fallu attendre le « De’ miei bollenti spiriti », l’air d’Alfredo à l’acte II de la Traviata, pour entendre les deux frères ensemble. Pene Pati se lance seul avant d’être rejoint depuis les coulisses par Amitai. Ils se partagent alors le rôle, feignant parfois quelques échauffourées, sous le regard amusé des spectateurs. De retour au répertoire français, plusieurs extraits du Roméo et Juliette de Gounod sont mis à l’honneur. Le timbre velouté de Golda Schultz s’illustre dans le « Je veux vivre » de l’acte I, Pene Pati nous réchauffant ensuite le cœur avec un radieux « Ah ! Lève-toi soleil. »
Bien différente, la seconde partie se concentre sur le XXe siècle. Amitai Pati se lance dans Be my love de Nicholas Brodszky, avant de laisser place à Golda Schultz pour « The Glamourous Life » (ext. de A Little Night Music de Sondheim). Pene Pati, quant à lui, nous prouve une fois de plus sa belle diction, en allemand cette fois, avec Lehár et le « Dein ist mein ganzes Herz » du Pays du sourire. Pas de doute, les Pati savent tout chanter.
Les louanges reviennent aussi aux musiciens, à l’aise dans ces différents répertoires (le charleston tiré du Temps d’aimer de Reynaldo Hahn est un petit bijou !) (1). Cette soirée nous rappelle un de leurs concerts, donné la saison dernière à la Philharmonie, dans un programme tout aussi jubilatoire avec Nadine Sierra et Pretty Yende.
Le concert se clôt par quelques douceurs (peut-être trop ?). La Mer de Trenet précède une chanson traditionnelle des Samoa, rappelant que les deux frères ont commencé leur carrière par cette musique. A propos de tradition, ils exécutent d’ailleurs le fameux haka néo-zélandais devant le public du théâtre des Champs-Elysées, que Golda Schultz fait pour sa part danser sur le tube planétaire Pata Pata. C’est ça aussi, les fêtes de famille ; il en faut pour tous les goûts !
Notez enfin que l’on retrouvera Pene et Amitai Pati dans la rare Beatrice di Tenda de Bellini, à l’Opéra de Paris du 9 février au 7 mars prochain (2)
Marion Guillemet
Paris, Théâtre des Champs-Elysées, 8 janvier 2024
(1) La pièce figurera en complément du premier enregistrement mondial du ballet Le Dieu bleu de Hahn à venir courant 2024 chez B. Records, sous la direction de Dylan Corlay //www.concertclassic.com/article/les-frivolites-parisiennes-et-dylan-corlay-recreent-le-dieu-bleu-de-reynaldo-hahn-au
(2) https://www.operadeparis.fr/saison-23-24/opera/beatrice-di-tenda
Photo © Edouard Brane
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