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Le Vaisseau Fantôme au Théâtre de Caen - Une enthousiasmante résurrection – Compte-rendu

Repris pour deux représentations au Théâtre de Caen, Le Vaisseau fantôme dans sa version d’origine avait brûlé les planches lors du Wagner Geneva Festival la saison dernière (1). Composé à Meudon au tout début des années 1840, l’opéra de Wagner ne verra jamais le jour dans cette mouture. Dresde découvrit Der fliegende Holländer en 1843, partiellement remanié (l’action se situe en Norvège et non plus sur le littoral écossais).
 
Exempte de toute aridité musicologique, cette résurrection bénéficie de l’emploi par François-Xavier Roth (photo) et son ensemble Les Siècles des instruments ayant cours à l’époque du compositeur. Loin de toute épaisseur germanique et d’une tradition qui s’est perpétuée jusqu’à nos jours, on retrouve à travers cette conception une alacrité de ton (voire une certaine verdeur), une clarté des plans sonores, un contraste des ambitus, un allant et une légèreté de ton (scène des fileuses) qui transparaissent dès l’ouverture, conduite avec énergie et prise de risques (les cors !). Les mânes de Marschner mais aussi de Meyerbeer refont surface, donnant une unité de ton rafraîchissante à un spectacle d’un seul tenant, fluide et inventif.

Dans le huis-clos imaginé par le metteur en scène Alexander Schulin, la Senta d’Ingela Brimberg, vraie voix wagnérienne aux capacités contenues jusqu’à la scène finale où elles se libèrent pleinement, transfigure son personnage sur le plan théâtral. Athlétique, Alfred Walker campe un Hollandais impressionnant de stature, timbre sombre et puissant qui, par bien des aspects, rappelle le légendaire Simon Estes à Bayreuth dans les années 80. Tous les autres protagonistes complètent avec bonheur ce plateau homogène : le cupide Donald/Daland de Liang Li, le Georg/Erik désemparé de Marcel Reijans, la Mary cheftaine de Kismara Pessati, ou encore le pilote de Maximilian Schmitt.
Chœur des Siècles très investi et bien préparé par Emmanuel Olivier. Le public adhère totalement à cette vision roborative, dépoussiérée et convaincante, avatar d’un wagnérisme naissant influencé par le modèle prégnant du grand opéra à la française.  
 
Michel Le Naour
 
(1) http://www.concertclassic.com/article/wagner-geneva-festival-excellence-et-enthousiasme-compte-rendu
 
Wagner : Le Vaisseau fantôme - Caen, Théâtre, 30 avril 2015. Prochaines représentations au Grand Théâtre du Luxembourg les 9 et 11 mai 2015 / bit.ly/1DUV1SJ

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