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Le Trouvère à l’Opéra Bastille - Quand tout va de travers – Compte-rendu

Etait-ce une bonne idée que de reprendre cette sinistre production du Trouvère signée Alex Ollé quelques semaines seulement après celle décourageante de La Force du destin (Jean-Claude Auvray) ? Verdi fait toujours recette, c’est entendu et le public accepte volontiers de fermer les yeux dès lors que ses oreilles peuvent goûter à des plaisirs nouveaux. Encore faut-il que les distributions choisies soient à la hauteur de ses attentes ...

Anna Pirozzi qui nous avait séduit en Leonora de La Forza en décembre dernier, un rôle on le sait ô combien exigeant, ne convainc pas un instant cette fois. Cette autre Leonora dont la filiation belcantiste est l’une des caractéristiques majeures, résiste à l’instrument de la soprano dont la raideur et les carences techniques sont rédhibitoires. Livrée à elle-même sur un plateau d’une rare laideur et où tout sonne faux, elle évolue au radar livrant une prestation vocale indigne : absence de trille dans chaque cabalette et surtout dans « D’amor sull’ali rosee », ligne de chant contrariée, filati inexistants, aigus hurlés ou escamotés, tout ceci est inacceptable, surtout après les performances vocales laissées par Netrebko et Radvanovsky.
 

© Sébastien Mathé - OnP

Déjà Manrico en 2018, Yusif Eyvazov reste égal à lui-même, droit dans ses bottes, mais toujours aussi frustre scéniquement, privé de musicalité et heureux possesseur d’aigus étranglés dont nous nous passerions aisément. Pas de chance non plus du côté de sa mère, la gitane Azucena chantée du bout les lèvres par la mezzo roumaine Judit Kutasi – qui, comme sa consœur fait l’impasse sur les nombreux trilles qui émaillent sa partition – et dont la voix est inaudible dans les ensembles. Etienne Dupuis est donc le seul à relever un peu le niveau, mais malgré de louables efforts qui le poussent à surintepréter la brutalité du Conte di Luna, il s’éloigne du personnage dont la sublime et inspirante musique porte tout de même d’autres intentions. Succéder à Ludovic Tézier n’est évidemment pas une mince affaire ...
Rien à dire de Roberto Tagliavini (Ferrando) et de Marie-Andrée Bouchard-Lesieur (Inès) ou des chœurs, mais beaucoup en revanche de la direction aussi molle qu’insipide de Carlo Rizzi, qui est parvenu en l’espace d’une soirée à nous faire douter des qualités de l’orchestre de l’Opéra ! Un comble.
 
François Lesueur
 

Verdi : Le Trouvère – Paris - Opéra Bastille, 24 janvier ; prochaines représentations les 27 janvier, 2, 5, 8, 11, 14 & 17 février 2023 // www.operadeparis.fr/saison-22-23/opera/le-trouvere
 
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