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Le Mahler Chamber Orchestra and Friends au Festival Castell Peralada – Gustavo Dudamel embrase Peralada – Compte-rendu

Les débuts du charismatique chef Gustavo Dudamel (photo) à Peralada étaient annoncés comme l'un des événements de l’édition 2019 ; ils n'auront pas déçu les attentes d'un public venu nombreux écouter un programme Mendelssohn/Mahler.

Gracieuse et féerique, l'exécution de la musique de scène pour le Songe d'une nuit d'été éblouit : scrupuleusement détaillée, aérienne et transparente, la partition se déroule dans un climat suave et quasi surnaturel, l'approche du maestro vénézuélien faisant appel à la pureté et à la délicatesse de jeu des pupitres du Mahler Chamber Orchestra and Friends. Transcendant l'esprit romantique du compositeur allemand, Dudamel semble aller chercher au fond des forêts le son du cor chargé d'une extrême poésie, tandis qu'il trouve aux cordes des sonorités d'une finesse inouïe qui atteste la présence des Esprits de l'Air. La ravissante comédienne espagnole Maria Valverde (photo), compagne du chef, se tire correctement de son rôle de narratrice (en castillan), cédant le moment venu la place aux belles interventions du chœur de femmes Orfeo Catala et des deux solistes, la soprano Mercedes Gancedo et la mezzo Lidia Vinyes-Curtis, dans cette nuit d'été qui conduit irrémédiablement aux plaisirs des sens. Dommage que de banales vidéos signées Miguel Guerrero, viennent ajouter un commentaire visuel assez plat d'où émerge un bestiaire naïf (faune, flore, étoiles...) qui n'apporte rien à la partition de Mendelssohn.
 
Changement radical avec la 1ère Symphonie « Titan » de Mahler donnée en seconde partie. S'effaçant avec humilité devant la pensée du compositeur, Gustavo Dudamel sait qu'il dispose d'une phalange réceptive et docile et peut tout obtenir d'elle. La prodigieuse musicalité des instrumentistes et l'osmose parfaite qui se dégage de l'ensemble lui permettent de venir à bout d’une œuvre complexe ou viennent se télescoper les thèmes les plus disparates – dont certains seront repris plus tard dans les fameux Lieder eines fahrenden Gesellen – et les formes les plus ancestrales, tel le canon sur Frère Jacques sur lequel est construit le 3ème mouvement, magnifié ici par d’extraordinaires percussionnistes. Magnifiques également le traitement de ces lointaines mélopées populaires, voire klezmer, dont le chef s'empare avec enthousiasme et intègre à cette remarquable marqueterie musicale pour mieux s'approprier le message mahlérien. Un grand concert.
 
François Lesueur

Festival Castell Peralada, 10 août 2019

Photo © Miguel González - Shooting

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