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La Chronique de Jacques Doucelin - L’EOP n’est plus, vive l’Orchestre de Chambre de Paris !

La rentrée est propice aux annonces et aux changements en tous genres dans les institutions et autres entreprises artistiques ou non. Restons-en à la musique. Au moment où il vient de perdre son ancien premier violon solo Luben Yordanoff, grand seigneur de la musique et fidèle ami de Pierre Boulez, l’Orchestre de Paris rajeunit ses cadres avec le recrutement de trois musiciens trentenaires. D’abord, le Français Lionel Sow sera le nouveau chef du Chœur d’amateurs fondé en 1976 par Daniel Barenboïm et Arthur Oldham : c’est une bonne nouvelle, car ces chanteurs à la fois dévoués et bénévoles aspirent à un travail de fond et régulier. Lionel Sow préparera le Chœur pour La Messe solennelle de Sainte Cécile de Gounod, que dirigera Jesùs Lopez Cobos les 1er et 2 octobre salle Pleyel. Deux jeunes chefs ont également été nommés pour trois ans au côté de Paavo Järvi, le Français Julien Masmondet, fondateur du festival « Musiques au pays de Pierre Loti », et le Letton Andris Poga qui a remporté l’an dernier le 1er Prix du Concours Evgeny Svetlanov à Montpellier.

Mais l’annonce qui devrait faire le plus de bruit dans le milieu musical parisien, ce lundi, c’est le nouveau nom de l’Ensemble Orchestral de Paris - dénomination bien lourde et non dénuée d’ambiguïté - rebaptisé tout simplement « Orchestre de chambre de Paris », comme c’est le cas dans de nombreuses villes, de Lausanne à Stuttgart. Ce changement d’étiquette n’a rien d’un cache-misère, ni ne vise à masquer un quelconque immobilisme. C’est bien au contraire l’aboutissement logique de changements artistiques importants intervenus depuis plusieurs saisons déjà dans l’organisation et la structure de la formation de chambre parisienne, et dont les fruits ont été constatés.

Le directeur général Jean-Marc Bador a préféré à la présence à sa tête d’un grand nom de la baguette l’invitation de solistes réputés destinés à motiver et à entraîner dans leur sillage les chambristes qui constituent cette phalange. A l’issue du contrat de Premier chef invité et Conseiller artistique du violoniste Joseph Swensen, c’est son collègue autrichien Thomas Zehetmair qui deviendra Chef principal de l’Orchestre de chambre de Paris. Car Jean-Marc Bador conçoit le gouvernement musical de sa formation comme un « dialogue à trois » entre le chef, la commission des musiciens et lui-même. Et cela pour mieux faire feu de tout bois.

A ce cénacle, s’associent des artistes comme le Chœur Accentus de Laurence Equilbey qui collabore dans le répertoire avec voix, Deborah Nemtanu comme violon solo et deux compositeurs James MacMillan et Thierry Escaich. Quant aux chefs invités tout au long de la saison, ce sont des habitués, de John Nelson à Louis Langrée en passant par Laurence Foster, Douglas Boyd, Olari Elts, Juraj Valcuha, Heinrich Schiff, Fabio Biondi, Jean Deroyer, Sir Roger Norrington ou Maxime Vengerov.

Subventionné à 80% par la Ville de Paris et à 20% par l’Etat, l’Orchestre de la capitale a choisi pour thème de la première saison sous son nouveau nom Paris et ses compositeurs. C’est plus qu’un programme, une profession de foi qui lui permet de ne pas s’enfermer dans les ors du Théâtre des Champs-Elysées, d’ailleurs fermé jusqu’en novembre, et de multiplier les lieux de ses concerts donnés en formation variable, de la salle Cortot au Théâtre Cent Quatre en passant par Notre Dame ou la basilique de Saint-Denis, du Théâtre 13 à la Cité de la musique en attendant la Philharmonie de Paris à La Villette dont il sera l’un des résidents à partir de la rentrée 2014.

Quant au répertoire, il ne s’interdit rien, du baroque et du classique au XXè siècle en passant par le premier romantisme. Jean-Marc Bador adore le Schumann dégraissé de Roger Norrington qui sera 1er chef invité au côté de Thomas Zehetmair. « La querelle des baroqueux est terminée et nous jouerons sur des flûtes en bois le cas échéant ! Il faut ouvrir les fenêtres. Il s’agit de faire un orchestre souple composé d’artistes complets. » Et qui n’oublie pas qu’il est porté essentiellement par une ville dont il ne saurait ignorer les besoins sociaux et culturels. « C’est la dimension généreuse qui nous fait obligation d’aller aussi dans des lieux défavorisés et moins conventionnels. »

Une nouvelle convention d’objectifs est du reste en préparations avec les tutelles. Elle se manifeste notamment dans les tournées prévues tant dans les principales capitales européennes qu’au Japon, en Amérique du Sud ou en Allemagne dans l’organisation desquelles le mécénat du club Crescendo (160.000 euros) joue son rôle. Une institution qui marche et sort de l’ornière, il faut lui tirer son chapeau !

Jacques Doucelin

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Photo : DR
 

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