Inusable La Cenerentola selon Jean-Pierre Ponnelle ? Cela dépend des reprises. Cette fois la mécanique comique si bien huilée a été remise à neuf par Grischa Asagaroff, avec légèreté et entrain. Miracle, Riccardo Frizza fait son orchestre sur les pointes, fusant, y mettant beaucoup d’esprit et lorsqu’il le faut la fragile touche de poésie dont Rossini a finement teinté son « dramma giocoso ». Un chef d’orchestre qui entend le vrai tactus rossinien sans en négliger les arrière-plans, cela est si rare de nos jours.

Comme un bonheur ne vient jamais seul, la troupe était également parfaite : Don Magnifico idéalement fat de Simone Alaimo, Dandini alerte, piquant selon Riccardo Novaro – quel maintien, quel entrain, quel beau baryton rossinien naturel - François Lis, idéal on s’en doute pour un Alidoro plus magicien que philosophe, un irrésistible duo de têtes à claques pour les sœurs marâtres (Jeannette Fischer toujours aussi déjantée, Cornelia Oncioiu qui soigne le chant de sa Tisbe), et évidement le Ramiro d’Antonio Siragsua, solaire, au timbre toujours un peu dur mais qui s’éclate à remplir Garnier de son beau clairon : au moins il entend le retour de sa voix conquérante, ce qui n’était pas le cas pour son Almaviva de Bastille.

Et Angelina ? On allait un peu tremblant, espérant tellement de Serena Malfi. On n’a pas été déçu. Physique radieux, voix de miel, mezzo colorature idéale qui fait claquer les mots et rend la romance des cendres ou le rondo final irrésistibles, avec jusque ce qu’il faut de pyrotechnie et surtout une ligne de pur bel canto. Cecilia Bartoli elle-même n’a qu’à bien se tenir, la relève est là ! Pour elle vous devez retourner à Garnier, mais aussi pour l’écrin que lui fait cette reprise exemplaire. La salle lui a réservé une ovation, demain le monde lui fera un triomphe.

Jean-Charles Hoffelé

Rossini : La Cenerentola - Paris, Opéra Garnier, 8 mars, prochaines représentations les 11, 13, 16, 19, 21 et 15 mars 2013.

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Photo : Opéra national de Paris/ Elena Bauer