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I Capuleti e i Montecchi de Bellini à l’Opéra de Marseille – Bénis des Dieux – Compte-rendu
Il y a des soirs bénis, où tout fonctionne sans heurt ni accroc, comme par magie, d'invisibles fées s'étant sans doute consultées pour répandre leurs ondes sur un plateau élu. C'est ce que s'est passé à Marseille lors de la troisième représentation de l’opéra de Bellini I Capuleti e i Montecchi. La production en elle-même ne restera pas dans les annales, Nadine Duffaut privilégiant la clarté et la sobriété pour raconter les démêlés historiques entre familles rivales vécus par les amants de Vérone.
Décors simples et harmonieux (Emmanuelle Favre), costumes élégants (Katia Duflot), direction d'acteur éprouvée, l'ensemble est conçu pour répondre au sujet et être porté par une équipe capable de laisser s'épanouir la musique. Et quelle distribution !
© Christian Dresse
Au sommet de ses moyens et de son art si particulier, Patrizia Ciofi confirme sa suprématie vocale dans ce répertoire, avec une Giulietta aux sonorités diaphanes, aux phrasés élégiaques et au style vertueux. Divinement habillée dans des tons pastels que rehaussent ses coiffures aux cheveux roux foncés, elle incarne cette héroïne délicate avec une touchante noblesse ; l'air d'entrée « O quante volte » bénéficie d'un timbre immaculé et d'un bouleversant legato – une poignante affliction – le second air « Ah non poss'io partire » est un miracle d’équilibre et d'imagination – et une d’absolue pureté musicale. Si cela était sa dernière apparition dans ce rôle, ce serait certainement la meilleure, l'approche de la cantatrice ayant considérablement mûrie par rapport à celle proposée à Paris en … 2008.
Le retour à une tessiture centrale plus proche du mezzo que de la soprano contraint Karine Deshayes (qui vient de nous sidérer dans une récente et sidérante Armida à Montpellier (1) et qui a prévu d’endosser le rôle de Semiramide la saison prochaine à Saint-Etienne) à réaliser quelques aménagements vocaux. La voix toujours riche dans le haut medium et puissante dans l'aigu est plus compromise dans le grave, le grand écart demandé n'étant pas sans incidence sur son ambitus. Ces problèmes techniques n'enlèvent rien à l'engagement et à la flamme qu'elle imprime à son personnage, héros au destin brisé en plein vol, qu'elle habite en musicienne accomplie et dont le timbre s’apparie merveilleusement à celui de sa partenaire.
Autour de ce duo magnifique, pas un faux pas : chœur parfait, orchestre mené avec soin par Fabrizio Maria Carminati, maestro depuis longtemps rallié à la cause belcantiste et qui porte haut les couleurs de Bellini. Ténor à suivre de plus en plus près, Julien Dran exécute avec une grande adresse le rôle de Tebaldo que l'on considère à tort comme anecdotique, Nicolas Courjal prêtant à Capellio sa présence autoritaire et sa voix granitique, tandis qu'Antoine Garcin défend très honorablement la courte partie dévolue à Lorenzo. Une grande soirée !
François Lesueur
(1) Lire le CR : www.concertclassic.com/article/armida-de-rossini-lopera-de-montpellier-etourdissante-vaillance-compte-rendu
Bellini : I Capuleti e i Montecchi – Marseille, Opéra, 1er avril ; dernière représentation le 4 avril 2017 / opera.marseille.fr/programmation/opera/i-capuleti-e-i-montecchi-vincenzo-bellini
Photo © Christian Dresse
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