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Gala des écoles de danse du XXIe siècle à Garnier - Si tous les chaussons du monde… - Compte-rendu

Superbe et joyeuse soirée que celle où quelques représentants de prestigieuses Ecoles de danse mondiales sont venues étoffer la mise en gloire de l’Ecole française de danse sur laquelle veille Elisabeth Platel, qui en avait eu l’idée. Un programme hétéroclite par sa composition et son ton, bien plus que par ses styles, mais qui a tranché par sa vivacité et son charme sur le caractère un peu tendu du gala AROP du 15 avril où jeunes danseurs de Nanterre et danseurs de la troupe se sont mêlés en une manifestation solennelle et prenante, mais parfois un peu rigide, en raisons sans doute de l’enjeu considérable de la soirée.

Ici, la mélange des genres était bénéfique, même s’il appelle quelques réserves : certes Elisabeth Platel accorde au pur académisme des œuvres qu’elle a gardées pour la soirée une importance que d’aucuns peuvent juger excessive, tant que la Nuit de Walpurgis ressortie du lointain Ballet de Faust, de Léo Staats et les Péchés de jeunesse commis par Jean-Guillaume Bart sur des pages de Rossini paraissent désuets. Pourtant c’est toute une histoire qui s’inscrit là, de ces ballets d’opéra au charme désuet, où paraissait l’Ecole avant les spectacles qui lui sont réservés aujourd’hui, et de toute la gamme des figures et des pas d’école sans lesquels ils ne serait pas possible à un seul danseur de se risquer ensuite dans Forsythe, Béjart, Petipa ou Millepied. L’enjeu est clair, et une soirée telle que celle-ci n’est pas faite que pour charmer, elle doit aussi expliquer, apprendre. Ce qui fut fait et parfaitement par des jeunes gens, on l’a dit plus détendus que quelques jours auparavant, et dont on ne citera pas les noms, même pour les charmantes solistes. La compétition viendra bien assez tôt.

En revanche autre teneur pour les étrangers, bizarrement venus en mini formations, en ce qui concerne la Scala de Milan- trois danseurs magnifiques dans une pièce de Petit sur les Gymnopédies de Satie : glamour, humour assurément. Même chose pour deux jeunes gens représentant l’Ecole du Ballet de Stuttgart et pour les trois venus de l’Ecole nationale du Ballet canadien, ou même pour le pas de deux d’Ashton dansé par l’Ecole du Royal ballet. A l’exception de la dernière, très typée, les pièces dansées n’avaient rien d’emblématique d’un style : juste de jeunes danseurs dans pièces contemporaines, comme en voit partout. Ils n’en ont pas moins déclenché l’enthousiasme d’une salle très jeune. En revanche, les Danois, aux couleurs de leur chorégraphe mythique, Bournonville (un français contemporain d’Andersen), les russes du Bolchoï, étincelants dans les Millions d’Arlequin de leur cher Petipa, et, dans le subtil Spring and Fall, les jeunes de Hambourg, merveilleusement expressifs, et façonnés par John Neumeier pour la survie de son œuvre, ont apporté un véritable éclairage sur leurs styles et leur histoires respectifs.

Point d’orgue délicieux, parce que la majesté de la marche de Berlioz qui accompagne généralement les Défilés de l’Ecole et du Ballet, a été remplacée par la plus légère marche d’Athalie de Mendelssohn, cette fois pour un Défilé unique dans les annales, exécuté par les élèves de Nanterre, mêlée à leurs camarades étrangers. Un délicieux millefeuille. Tandis que le chef Marius Stieghorst cravachait l’Orchestre des Lauréats du Conservatoire avec son entrain coutumier. La salle surchauffée a scandé le défilé d’un même élan, de la première à la dernière note. La joie de danser, ce soir là, était contagieuse.

Jacqueline Thuilleux

Paris, Palais Garnier, 20 avril 2013

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Photo : David Elofer
 

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