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Gala de l’Académie Princesse Grâce à Monaco – Pour l’amour de la danse – Compte-rendu

Soir de gala, oui, vraiment ! Non par la somptuosité des parures du public, mais par la superbe qualité des jeunes danseurs formés à une vie d’entrechats et de pirouettes par cette école d’exception, fondée en 1975 par le couple régnant de Monaco – on sait combien la Princesse Grâce aimait la danse – et à laquelle l’immense ballerine et pédagogue Marika Besobrasova donna son style et ses règles. Aujourd’hui, c’est le dynamique cinquantenaire Luca Masala, lauréat de multiples concours, interprète des meilleurs chorégraphes dans les grandes compagnies, qui a repris le flambeau, et ce depuis 2009, date à laquelle la Princesse Caroline de Hanovre a nommé Jean Christophe Maillot à la tête d’une structure comprenant les Ballets de Monte-Carlo, le Monaco Forum Dance et l’Académie Princesse Grâce. Le choix de Maillot s’est donc porté, pour cette dernière, sur ce pétillant sarde, entouré que quelques professeurs remarquables, tant l’excellence des élèves arrivés en fin d’études – celles-ci durent cinq ans, parle pour eux. Et notamment Michel Rahn, chorégraphe également, lequel avait concocté pour ce gala qui marquait aussi son départ, deux pièces réjouissantes, hymnes à la jeunesse dans laquelle il a baigné et qui a conservé la sienne.
 

© Alice Blangero

Maillot et la princesse Caroline étaient là, veillant fidèlement sur leurs poulains, qui portent haut et fort le prestige de la principauté car le but de l’enseignement de l’école n’est pas d’apprendre à mettre les pieds en dehors et d’ingérer les cinq positions, mais de former de jeunes professionnels. Et sur les 35 jeunes danseurs en présence dans la soirée, huit ont déjà trouvé scène pour leurs chaussons, d’Ashley Krauhaus engagée par les Ballets de Monte-Carlo, à la délicate Anri Sugiura, en partance pour le Semperoper Ballet de Dresde, et à deux flamboyants lurons, Luca Righi, qui s’en ira rejoindre Nicolas Le Riche au Royal Swedish Ballet et le virevoltant Enrique Bejarano, heureuse prise du Royal Birmingham Ballet : avec ses cheveux noirs ébouriffés, ses sauts éclaboussants, sa joie de vivre, la justesse de ses bras, on le rêve en Mercutio, et bien d’autres. C’est à ces heureux partants  et à deux de leurs camarades, tout aussi percutants, que Jean Christophe Maillot a consacré une petite création très ludique, comme il sait les brosser : esprit sportif, tuniques toniques, gaieté malicieuse, son Bach on track avait la vitalité d’un baroque modernisé.
 
Pour le reste, tonalité américaine très affirmée, puisque de l’Ouverture de Rahn et du Who Cares de Balanchine, remonté par Nanette Glushak, qui précéda Kader Belarbi au Ballet du Capitole et fut une prêtresse du grand maître américain, on baignait dans Gershwin, avec de poétiques duos ou des confrontations délurées, mettant en valeur non seulement les superbes pointes de l’Académie, mais aussi les personnalités des interprètes. En seconde partie, Appassionata, de Michel Rahn, sur Piazzolla, ne prêtait pas non plus à tristesse, avec ses croisements saccadés, ses secousses électriques particulièrement flatteuses pour les ensembles de garçons. Irrésistible.
Aux frontières de l’hexagone, l’Académie Princesse Grâce se classe donc comme un îlot de survie particulièrement vivace, qui, avec l’Ecole de Rosella Hightower à Cannes, laquelle forme les enfants, marque la Côte d’Azur du sceau d’une danse classique en pleine santé. On suivra ses jeunes champions de beauté à la trace.
 
Jacqueline Thuilleux

Monte-Carlo, Grimaldi Forum, 26 juin 2021

Photo © Alice Blangero

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