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Festival international de Musique de Besançon Franche-Comté 2020 – Le sens de l’adaptation

Festival maintenu à Besançon mais, comme partout où un tel choix a prévalu, les organisateurs ont dû faire montre d’un grand sens de l’adaptation ; Jean-Michel Mathé, directeur général, et son équipe ont ainsi complètement remanié l’affiche du 73e Festival. La manifestation franc-comtoise est étroitement associée à la musique orchestrale et ce n’est pas de gaîté de cœur, on l’imagine, que ses responsables ont été contraints de sacrifier la quasi-totalité des rendez-vous symphoniques prévus, ne maintenant que le concert inaugural (retransmis sur écran géant) de l’Orchestre Victor Hugo Franche-Comté mené Jean-François Verdier – qui lui a donné la formidable impulsion que l’on sait – , le concert de l’Orchestre des jeunes de l’Orchestre VHFC (lui aussi conduit par Verdier) et celui de l’Orchestre de chambre de Lausanne dirigé par Joshua Weilerstein (avec Alisa Weilerstein en soliste).
 

Jean-Michel Mathé, directeur général du Festival international de Musique de Besançon © Yves Petit
 
La jeune génération à l'honneur

« Edition limitée » ? Pour les effectifs certainement, mais sous une allure plutôt intimiste l’édition 2020 se révèle riche et séduisante sur le plan musical, avec une belle place réservée aux interprètes de la nouvelle génération. Ainsi, l’excellent Trio Metral (photo) –  initialement attendu pour un seul concert – se produit-il à trois reprises (à Belfort et à Besançon) dans un programme réunissant des partitions de Chostakovitch, Mendelssohn et Camille Pépin. La musique de cette dernière figure aussi dans le récital de Célia Oneto Bensaid, à côté de pièces de Glass et Ravel – dialogue franco-américain qui préfigure l’enregistrement que la pianiste nous offrira l’an prochain (chez NoMadMusic). Côté musique de chambre, on n’oubliera pas non plus le rendez-vous avec le Quatuor Yako, jeune formation en résidence à ProQuartet qui mérite une attention particulière.
 

Le Winds Arts Orchestra © DR
 
Mozart transformé et illustré

C’est toujours au chapitre chambriste que l’on rangera le Concerto pour violoncelle de Dvorak, donné en effectif réduit par Camille Thomas et l’Ensemble Appassionato de Mathieu Herzog , ou encore, dans une mise en scène de Jean Pétrement (de la Compagnie Bacchus), les merveilleux duos pour deux violons de Bartók par les violonistes et comédiens Clément Wurm et Léonard Stefanica.
Mozart offre pour sa part prétexte à deux propositions originales. Son Menuet KV 355 a inspiré à Gérard Pesson une série de Douze transformations (à la manière de Beethoven, Schumann, Webern et autres) que l’on découvrira grâce aux instrumentistes de l’Ensemble Cairn. Quant à la « Gran Partita » KV 361, c’est le Winds Arts Orchestra de Julien Bénéteau qui s’en empare avec en contrepoint les illustrations en direct de Grégoire Pont – le spectacle promet de ravir petits et grands.
 
Des incursions du côté de la musique du monde (Brésil, Irlande, Balkans, Argentine) et du jazz viennent comme de coutume colorer la programmation d’un festival dont le directeur général, malgré la situation compliquée du moment, reste confiant. « Nous ne sommes pas en danger financièrement, souligne-t-il. Région, département, ville, mécènes ; personne ne nous a lâché ! ».
 
Organiser un concours international au temps du Covid
L’une des grandes préoccupations de Jean-Michel Mathé demeure le prochain Concours (biennal) de jeunes chefs d’orchestre dont la 57e édition se déroulera dans le cadre du Festival 2021. « J’ai déjà un président de jury – britannique – un orchestre, des dates, le concours peut se dérouler dans les conditions sanitaires de cette année. » Le directeur est plus préoccupé par la première phase de la compétition : « notre spécificité est de ne pas procéder à une sélection sur dossier mais d’organiser des épreuves dans différentes grandes villes étrangères où tous les candidats sont auditionnés par le même jury, avec les même pianistes. Ce serait un crève-cœur que de devoir y renoncer. Pour le moment, l’option qui prévaut est le maintien du concours, des présélections selon les modalités habituelles, en réduisant peut-être le nombre de candidats et en retardant un peu – jusqu’à la fin janvier – la date limite d’inscription. Quant à l’éventuelle modification des villes de présélection, elle sera fera en fonction de la situation des pays. »
Le sens de l'adaptation prévaudra donc, là encore, selon l'évolution de la pandémie dans le monde au cours des mois à venir. Jean-Michel Mathé regretterait en tout cas de devoir renoncer à Pékin "d'un niveau exceptionnel lors des présélections du précédent concours" ou à Montréal, ville où après avoir collaboré avec l'Université la célèbre compétition bisontine apprécie "l'extrême motivation" du Conservatoire, son nouveau partenaire – et les formalités administratives, infiniment plus simples qu'aux Etats-Unis, pour les candidats non américains.

Alain Cochard
(Entretien avec Jean-Michel Mathé réalisé le 27 août 2020)
 

73ème Festival international de Besançon
Du 11 au 20 septembre 2020
festival-besancon.com/
 
Photo © Lusankar productions

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