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Elektra et Don Giovanni au Festival d’Aix - Meurtres à Aix
Toute nouvelle mise en scène lyrique de Patrice Chéreau est un événement mais le voir se confronter à l’Elektra de Richard Strauss, à la violence de la tragédie des Atrides, c’est le retrouver pour ainsi dire chez lui. Son œuvre au théâtre comme au cinéma est parcourue par cette veine sanglante, cette folie meurtrière, où les personnages sont au bord de se rompre.
Et la musique de Richard Strauss elle même, âpre, abrupte, violente, hystérique, correspond exactement au vocabulaire dramatique du metteur en scène, à sa direction d’acteur suractive, à la nervosité sans relâche de son action théâtrale. Pour Aix, qui a toujours plutôt regardé du côté du Strauss tendre – Ariane à Naxos est demeurée longtemps associée à la scène de l’Archevêché – la grande machine à meurtres d’Elektra sera comme un séisme, rendu possible par le confort moderne du Grand Théâtre de Provence. Esa-Pekka Salonen (photo) règle la danse de mort aux commandes d’un Orchestre de Paris métamorphosé par le travail en profondeur entrepris par Paavo Järvi, et le plateau aligne une distribution de grande venue : Evelyn Herlitzius, Elektra plus séduisante qu’à l’accoutumée mais voix de feu, Adrianna Pieczonka, Chrysothémis altière, Mikhail Petrenko, Oreste juvénile, le vétéran Tom Randle pour les cris d’agonie d’Egiste, mais surtout Waltraud Meier pour les songes de sang de Clytemnestre, incarnation qu’on pressent majeure.
Parallèlement, Le Théâtre de l’Archevêché retrouve le Don Giovanni de Mozart dans la régie au cordeau de Dmitri Tcherniakov qui avait fait couler tant d’encre lors de sa création en 2010 (1). Marc Minkowski reprend le flambeau, avec, surprise !, non pas Les Musiciens du Louvre, mais l’Orchestre Symphonique de Londres ! On guettera le Don Giovanni ravageur de l’inoxydable Rod Gilfry et la prometteuse Donna Anna de Maria Bengtsson, Kyle Ketelsen reprenant son Leporello amer et Kristina Opolais retrouvant Elvira, qui avait bien failli lui coûter sa voix.
Jean-Charles Hoffelé
(1) La captation de la création du spectacle vient d’être éditée en DVD. On y retrouve le Don Giovanni si subtil de Bo Skovhus entouré d’une distribution sans faille, sous la direction alerte de Louis Langrée. La captation précise de François Duplat révèle l’incroyable direction d’acteur engagée dans ce spectacle par Dmitri Tcherniakov (2 DVD BelAir BAC080).
Strauss : Elektra
10, 13, 16, 22 juillet 2013 – 20h (sauf le 13 à 17h)
Aix-en-Provence - Grand Théâtre de Provence
Mozart : Don Giovanni
5, 8, 10, 13, 15, 18, 20, 23 juillet 2013 – 21h 30
Aix-en-Provence - Théâtre de l’Archevêché
www.festival-aix.com
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Photo : Katja Tähjä
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