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DVD : Cyrano, enfin !

C’est José Luccioni, déjà dans l’original français, qui avait crée le 29 mai 1936 à l’Opéra comique ce Cyrano de Bergerac où Franco Alfano mit tout son art d’orchestrateur et sa resplendissante invention mélodique. Roberto Alagna relève le gant, mieux il permet à une œuvre majeure de se réinscrire dans le paysage de l’opéra français de l’entre deux guerres. Bretteur invétéré, amant malheureux et valeureux, Cyrano avait tout pour séduire le ténor français, qui le lui rend bien : incarnation tour à tour brillante et touchante, où Alagna, en voix de gloire, met tout son art de comédien.

Le spectacle connut les heurts de la grève des intermittents, mais René Koering parvint à rassembler ses forces montpellierennes pour une unique soirée. Tout fut donc capté sur l’instant, par des caméras Luma immergées dans le spectacle et dans la salle. George Blume réalisa un vrai film d’opéra dans le théâtre. On n’avait pas vu cela depuis la Zauberflöte de Bergman et à l’exemple de celle-ci, Cyrano est une parfaite réussite, avec ses décors de studio, et son ambiance qui sent bon les planches.

Distribution formidable, où brille la relève des barytons français, Barrard, Ferrari, Dolié décidément épatants, tous emmenés par le De Quiche suprêmement élégant de Rivenq, jusqu’à Richard Troxell qui surveille son français pour camper un Christian attachant. Et Roxanne ? Il faudra suivre Nathalie Manfrino, son timbre laiteux, sa diction exemplaire la destinent tout naturellement à Mélisande. Dans la fosse, Marco Guidarini fait généreusement sonner l’orchestre diatonique d’Alfano, ne couvrant jamais les voix sans renoncer aux formidables pouvoirs évocateurs d’une partition qui mérite de reprendre sa place au répertoire. Après l’avoir entendue, qui voudrait l’oublier ?

Jean-Charles Hoffelé
 

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