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Diana Damrau et Béatrice Uria-Monzon à Orange - Parenthèse de charme - Compte-rendu
Un vent léger gonflait les voiles de Diana Damrau, toute de mousseline verte puis orangée, tandis qu’elle poussait sa silhouette de très proche maman à la conquête de l’immense plateau d’Orange, séduisant la foule d’un rire, d’un léger geste de la main, d’une irrépressible joie de vivre : étonnante soprano, qui pour ses premiers pas au Théâtre antique, s’est emparée du vaisseau avec autant d’aisance que d’un salon. Vaporeuse, mutine, délicieusement cabotine, la blonde allemande sortait du Printemps de Botticelli tandis qu’en parallèle s’avançait, altière et sombre, Béatrice Uria-Monzon, jaillie du caillou méditerranéen : festival d’élégance, et de séduction, que ces deux femmes, l’une tout en courbes, l’autre droite comme un oracle. Elles ont su mêler et alterner leurs natures dissemblables pour un concert qui fut un moment d’oxygène entre les sombres séductions d’une Turandot souveraine. Toutes deux soutenues, caressées d’une baguette amoureuse par un Michel Plasson aux anges, et gardant sa vigueur proverbiale pour des intermèdes orchestraux, particulièrement l’ouverture du Corsaire, que l’Orchestre National envoyait avec jubilation.
Côté chant, l’aventure offrait de belles surprises, bien que les deux dames fussent toutes deux légèrement perturbées physiquement, ce qui expliquait sans doute pour Uria-Monzon une émission fragmentaire et voilée, laquelle n’entravait pas le dramatisme de ses grandes envolées dans les airs d’Eboli ou de Tosca, mais limitait leur compréhension, surtout pour la Didon des Troyens. Heureusement, le talent de cette reine des Chorégies lui fait rattraper ses faiblesses vocales par son intensité, et le public ne s’y trompe pas.
Il découvrait, en revanche, les séductions veloutées et perlées de la voix de Diana Damrau, et lui a clamé son enthousiasme, s’émerveillant d’une subtilité vocale qui permet à la soprano de filer des pianissimi d’une délicatesse incroyable, perçus en ce lieu énorme sans la moindre faille. Qualité rare dont Barbara Hendricks fit ici preuve, autrefois. Mais là aussi, quel talent pour glisser sur de petites imperfections, grâce à un art d’équilibriste qui lui permet de rétablir d’un tour une vocalise hésitante. Adorable tricheuse dans ce répertoire belcantiste où on la connaît moins que dans Mozart, Somnambule langoureuse, plus que Lucia ou Elvira des Puritains. Certes, il lui manquait un peu de ce dramatisme que sa partenaire dispense, mais l’enchantement n’en agissait pas moins. Moments délicieux, surtout ceux où les deux femmes ont fondu leur timbres dans deux duos de charme, de Lakmé aux Contes d’Hoffmann, Finesse, harmonie : la salle roucoulait.
Jacqueline Thuilleux
Orange, Théâtre antique, 30 juillet 2012
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Photo : DR
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