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De La Colombe aux Shadoks Trois Questions à Mireille Larroche


Après une première représentation le 16 janvier au Théâtre de Fontainebleau, La Colombe de Charles Gounod s’installe à La Péniche Opéra du 21 janvier à la mi-mars. Une occasion de découvrir un opéra comique méconnu dans une mise en scène de Mireille Larroche.

Pour quelles raisons avez-vous décidé de monter La Colombe ?

Mireille Larroche : La Péniche Opéra s’intéresse depuis longtemps à l’opérette et, depuis un moment, d’autres équipes se sont emparées de ce répertoire et le font très bien. Nous avons envie pour notre part de nous consacrer plus désormais au genre particulier qu’est l’opéra comique, et ce en remontant jusqu’à ses origines (Les Troqueurs de Dauvergne sont par exemple en projet). En nous penchant sur la partition de La Colombe nous avons découvert un ouvrage très réussi. Il s’agit d’une œuvre de maturité de Gounod, écrite pour Baden Baden en 1860, un an donc après Faust. Le livret de Barbier et Carré est pour beaucoup aussi dans cette réussite. Il s’inspire d’une fable de La Fontaine dont on sent bien l’esprit. Le résultat est la fois élégant, divertissant et avec une morale qui, comme souvent chez La Fontaine – lui-même inspiré de Boccace -, est un peu surprenante. Bien ficelé le livret met en scène des personnages savoureux. La Colombe est une partition épatante et offre un bel exemple d’opéra comique ; une alliance de théâtre et de musique qui se situe dans le registre du divertissement, sans être forcément « comique ».

Je pense que la rareté de La Colombe tient au fait que l’ouvrage est assez difficile à chanter. Quatre personnages, à peu près tout le temps présents, pas de choeur : l’ouvrage n’est pas assez « large » pour les grandes maisons d’opéra – mais très bien pour nous !

Comment avez-vous choisi de traiter La Colombe, dont l’argument conte la visite d’une précieuse à un hobereau de province ?

M. L. : Le thème de La Colombe, la confrontation ville et campagne, culture et nature a depuis longtemps alimenté notre répertoire théâtral et musical. Le côté rousseauiste de Marie-Antoinette retournant à la nature dans son Petit Trianon avec ses petits moutons et ses belles dentelles me fait penser à certains de nos bobos qui découvrent la nature en 4X4, avec leur portable et toute leur culture citadine. Je me suis amusée à épingler cette façon de faire et c’est d’ailleurs bien de ça dont parle La Fontaine, sans rien de caricatural ou de manichéen toutefois. Le hobereau de province, ancien citadin qui a renoncé à la ville et a rejoint la nature de façon un peu misanthrope pour y retrouver une « pureté » est épinglé dans cette fable, tout comme ces femmes qui animaient les salons mondains du siècle des Lumières. Elles étaient assez « garces » entre elles, mais ce sont aussi les premières qui ont donné une certaine forme de liberté aux femmes. Mais tout cela reste un divertissement et n’a rien d’un spectacle politiquement engagé. Nous n’avons absolument rien touché aux paroles de la musique, il n’y a que dans les scènes parlées qui ont été un peu coupées, allégées et modernisées.

Quels sont les autres temps forts de la programmation de la Péniche Opéra en ce début d’année ?

M. L. : « Shadoks et Compagnie » vient de démarrer (en soirée, à 19h, et dans le cadre des « Petits dèj’ musicaux » du dimanche à 12h) et réunit trois mélodrames : Sports et Divertissements de Satie, L’Histoire de Babar de Poulenc et une commande à Denis Chouillet autour des Shadoks. Puisque j’ai pu avoir les droits des Shadoks, nous allons faire Les Shadoks à l’Opéra en épisodes: Denis Chouillet a écrit une très jolie partition et tout ce spectacle est interprété par la merveilleuse Edwige Bourdy.

Par ailleurs, les « Lundis de la contemporaine » se poursuivent et le prochain rendez-vous (27 janvier) est consacré à Denis Machuel, un jeune compositeur qui travaille essentiellement pour la voix.
La dernière chose importante à souligner est que la Péniche Opéra est en résidence depuis le 1er janvier à Fontainebleau et dans le sud de la Seine-et-Marne. Nous traversons tous une période difficile en ce moment et je trouve courageux qu’un maire et un conseil général aient pris la décision de mettre en résidence une compagnie lyrique ; c’est une belle aventure qui commence. La première de La Colombe aura lieu au Théâtre de Fontainebleau dans une version avec orchestre dirigée Pierre Roullier à la tête de l’Ensemble Ad Novem (1), puis le spectacle sera donné avec piano à la Péniche Opéra, avant de tourner (en version piano ou orchestre selon les lieux) durant la saison prochaine.

Propos recueillis par Alain Cochard, le 10 janvier 2009

On a eu l’occasion d’entendre cet excellent ensemble l’an dernier dans La Forêt bleue de Louis Aubert mise en scène par Mireille Larroche. L’arrangement pour dix instruments de La Colombe est signé de Manuel Doutrelant, avec des transcriptions additionnelles de Jean-Yves Aizic

(1) Charles Gounod : La Colombe. Théâtre de Fontainebleau. Vendredi 16 janvier 2009 - 20h30
Tel. : 01 64 22 26 91.

La Péniche Opéra. Face au 46, quai de la Loire / 75019. Du 21 janvier au 14 mars (à 19h ou 20h30 selon les jours). Tel. : 01 53 35 07 77. Programme détaillé

www.penicheopera.com

Photo : DR

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