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Compte-rendu : Un chef transcendant - Tosca aux Chorégies d’Orange
Cette production de Tosca aux Chorégies d’Orange aura apporté un démenti aux détracteurs de Puccini tant la direction du chef finlandais Mikko Franck, à la tête d’un Orchestre Philharmonique des très bons jours, rend justice à une orchestration contrastée et arachnéenne aux infinies nuances. La gradation de la progression dramatique, le caractère quasi impressionniste aux tonalités debussystes de la matière musicale (air « Io de’sospiri » du jeune berger au début de l’acte III si proche de Pelléas), la capacité à accompagner la ligne vocale dans toutes ses expressions, à exploiter les potentialités du chœur (ceux, excellents, des Opéras d’Avignon, Toulon et Toulouse) sont une véritable fête pour les sens. Le tempo lent adopté a le mérite de creuser les moindres inflexions de la phrase puccinienne, quitte parfois à pousser les chanteurs dans leurs retranchements.
Le plateau tire pour l’essentiel son épingle du jeu. Face au mur d’Orange, la Tosca de Catherine Naglestad peut manquer de puissance ou encore de stabilité dans l’intonation, mais son incarnation ne joue pas systématiquement la carte de la tragédienne et préfère doser sans débordements passionnels un rôle complexe. Le Théâtre antique n’a plus de secret pour Roberto Alagna qui sait triompher de l’acoustique, projeter sa voix avec aisance en incarnant un Mario juvénile, à l’enthousiasme toujours présent et surtout d’une qualité de diction exemplaire. Par le sentiment d’inquiétude et de terreur qu’il dégage, Le Scarpia de Falk Struckmann est saisissant de présence théâtrale. Parfois en difficulté, sombre voire charbonneux, le baryton n’a certes plus les moyens qui furent les siens dans les grands opéras wagnériens, mais il en impose tellement que l’on finit par en oublier ses limites. Les comprimari sont bien campés : le geôlier de Jean-Marie Frémeau, le sacristain de Michel Trempont souvent proche de l’opéra bouffe et sautillant à souhait, ou encore ces sbires inquiétants incarnés par Christophe Mortagne (Spoletta) et Jean-Marie Delpas (Sciarrone).
La mise en scène de Nadine Duffaut exploite toutes les caractéristiques du lieu en évitant les mouvements de foule excessifs. Elle privilégie la solennité (processions, scène du mariage…), tout en plaçant l’ensemble de l’action dans un univers proche du fascisme mussolinien. Un immense portrait de Marie-Madeleine tient lieu de décor frontal et se fissure à la scène finale pour laisser disparaître Tosca. Les acclamations du public saluent une représentation qui, à chaque instant, captive, à l’image d’une œuvre dont la popularité ne s’est jamais démentie depuis sa création.
Michel Le Naour
Puccini : Tosca - Chorégies d’Orange, 18 juillet 2010
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Photo : DR
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