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Compte-rendu : Till Fellner et Martin Helmchen, une confrontation édifiante


Les hasards de la programmation remettent parfois les pendules à l’heure. A en juger par le concert de Till Fellner (photo) Salle Gaveau à l’occasion du quatrième volet de son intégrale des Sonates de Beethoven et celui de Martin Helmchen avec l’Orchestre National de France dans le 24ème Concerto pour piano de Mozart, il semble que, tous mérites confondus, l’autorité de l’un l’emporte aisément sur la prudence de l’autre.

Désormais, Fellner a pris ses marques par rapport à l’héritage de son ancien professeur Alfred Brendel, et sa conception des Sonates de Beethoven (en l’occurrence la « Pastorale », « A Thérèse », « Alla Tedesca » et la Sonate n°27 op 90) présente un caractère altier fait d’un dosage tout autant architectural que pictural (avec une main gauche d’une densité sonore saisissante). La simplicité, l’énergie contrôlée, la beauté tranquille de l’exécution (Largo de la Sonate n°4, Andante de la Sonate « Pastorale ») produisent un sentiment de plénitude digne d’un grand beethovénien.

Dans le répertoire mozartien, l’Allemand Martin Helmchen (artiste confirmé qui a remporté en 2001 le Concours Clara Haskil) paraît gommer, malgré l’égalité digitale et la fluidité dont il fait preuve, toute la dimension dramatique du Concerto n°24 de Mozart au profit d’une réalisation d’un ambitus délibérément resserré, desservi il est vrai par l’accompagnement peu engagé de Yutaka Sado et par l’épaisseur des cordes de l’Orchestre National. On attendrait, dans cette œuvre qui regarde vers Les Noces de Figaro et prépare à l’intensité des pages à venir, davantage de mordant et de prise de risques. Le bis (l’Adagio de la Sonate KV 332) sollicite trop le texte et le clavier se perd dans le décoratif au lieu d’émouvoir.

Heureusement, en seconde partie, Sado reprend son dynamisme coutumier dans les Escales de Jacques Ibert très enlevées, d’une sensualité contagieuse (Tunis-Nefta). Il rappelle enfin dans Les Fêtes romaines d’Ottorino Respighi tout ce que le compositeur italien doit à la Shéhérazade de son maître Rimski-Korsakov. Sa direction roborative et d’un rythme tranchant tempère le caractère pompeux et monumental de ce péplum aux accents parfois felliniens.

Michel Le Naour

Paris, salle Gaveau, le 14 octobre - Théâtre des Champs-Elysées, 15 octobre 2009

Programme du Salle Gaveau

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Photo : DR

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