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Compte-rendu - L’Opéra Studio du Rhin à Colmar - Un bain de jouvence


Ce spectacle judicieusement intitulé « Je t’aime moi non plus » met à profit le talent de jeunes chanteurs de l’Opéra Studio du Rhin confrontés aux rôles les plus représentatifs de l’opéra français. Dans une production d’une subtilité de touche proche du libertinage se succèdent différents états d’âme où la passion est prise au piège des sentiments. A tour de rôle, grâce à l’entremise du personnage de la Muse incarné par la pianiste Elsa Lambert (tour à tour interprète de pages de Satie ou Debussy et récitante de poèmes de Baudelaire, Eluard, Aragon, Musset…), défilent les héros et héroïnes des Contes d’Hoffmann, Roméo et Juliette, Faust, Don Quichotte, Lakmé, Thaïs, Carmen, La Jolie Fille de Perth, Les Pêcheurs de Perles, Pelléas et Mélisande, Les Aventures du Roi Pausole ou de L’Amour masqué

L’engagement de chacun fait parfois oublier quelques légères défaillances, mais on remarquera la rondeur de timbre de la basse russe Andrey Zemskov (au français parfois approximatif) dans Don Quichotte de Massenet, l’aisance de la soprano allemande Susanne Braunsteffer dans la scène des bijoux de Faust de Gounod, la prestation du ténor mexicain Manuel Betancourt dans l’air d’Escamillo, ou le piquant de la française Pauline Sabatier dans « J’ai deux amants… » de Massenet. Le ténor chinois Xin Wang témoigne d’une puissance vocale parfois poussée dans « Ah ! Lève-toi, soleil ! » de Roméo et Juliette ou dans le duo « Tu m’as donné le plus beau rêve » de Lakmé (avec l’excellente soprano Anaïs Mahikian très en verve également dans un extrait succulent des Mamelles de Tirésias de Poulenc), et la diction impeccable du baryton-basse Olivier Déjean donne toute sa dimension à l’air « Quand la flamme de l’amour » de La Jolie Fille de Perth de Bizet.

A la tête de l’Orchestre Symphonique de Mulhouse, Emmanuel Joël-Horniak est un partenaire sensible à l’accompagnement des voix. Cette représentation pleine de fraîcheur ne saurait toutefois exister sans la mise en scène imaginative et évocatrice de Philippe Arlaud également créateur des décors, costumes et lumières. Grâce à lui, la finesse si passagère des sentiments est évoquée par le truchement de panneaux mobiles figurant « La Balançoire » de Fragonard ou par des voiles flottant au vent au gré des rapports amoureux écartelés entre amour et désamour. A l’époque où l’on s’interroge sur l’avenir du chant depuis la disparition des troupes d’opéras, le vivier que représente l’Opéra Studio est un gage bien prometteur.

Michel Le Naour

Colmar, Théâtre municipal, 26 mars 2009

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Photo : DR

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