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Compte-rendu - La Navarre en majesté


Entre deux représentations du Cyrano de Bergerac de Franco Alfano au Châtelet avec Placido Domingo, l'Orchestre Symphonique de Navarre a jailli de la fosse pour s'éclater sur la scène sous la baguette de son bouillant patron depuis 1996, Ernest Martinez Izquierdo. Des extraits de deux chefs-d'oeuvre de Manuel de Falla, La Vie brève et Le Tricorne, encadraient deux pièces russes destinées à illustrer la vaillance et le sens du style de la phalange navarraise, doyen des orchestres espagnols.

Pari tenu avec un remarquable 2e Concerto pour piano de Prokofiev aux nuances et à la rythmique impeccables. La parfaite homogénéité des pupitres et la constante clarté des lignes mélodiques rendent justice à cette très grande page de la musique européenne. Des musiciens qui ont su mériter un soliste de première classe en la personne de Nikolaï Demidenko, digne représentant de la légendaire école russe de piano dans ce qu'elle a de meilleur, virtuose et musicienne à la fois.

La suite d'orchestre n°2 (1919) de L'Oiseau de feu de Stravinsky est un peu moins convaincante après l'entracte : l'interprétation accentue les oppositions au détriment de la vision d'ensemble. Mais la seconde suite du Tricorne de Manuel de Falla va balayer toutes les réticences avec un chic à couper le souffle. C'est d'ailleurs cette perpétuelle danse sur le volcan qui fascine chez Ernest Martinez Izquierdo. Le populaire y échappe comme par miracle à toute vulgarité, emporté par un tourbillon de rythmes et de couleurs : du très grand art. Au point que le chef et ses musiciens ne s’en sont pas tirés comme ça : il fallut de nombreux bis puisés aux meilleures sources de la zarzuela, genre si justement cher au coeur de Placido Domingo, pour étancher l'enthousiasme du public.

Jacques Doucelin

Paris, Théâtre du Châtelet, 20 mai 2009

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Photo : DR

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