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Compte-rendu : Diseur de rêve - Fou Ts’ong en récital au TCE

Au Théâtre des Champs-Elysées, le pianiste d’origine chinoise Fou Ts’ong, invité par le Festival Piano aux Jacobins dans un programme consacré uniquement à Chopin (un compositeur qui lui a valu d’être couronné à Varsovie en 1955), a montré toute l’exigence d’un art qui atteint l’inouï. Sa science du clavier n’a plus besoin ni d’artifices ni de postures. Sous ses doigts, le Yamaha est oublieux des marteaux et traduit – aussi bien dans les Mazurkas op 17 et op 59, les six Etudes extraites de l’Op. 10 que les deux Nocturnes op 62 – l’expérience d’une culture qui est la propre vie de ce fils de mandarin, parvenu à un âge (il est né en 1934) où l’on cultive son jardin en sélectionnant les espèces les plus rares. Ascétique mais souple comme une liane, peu soucieux d’une perfection que ses doigts parfois refusent, son corps pénètre au tréfonds du clavier et chaque note exprime un monde qui fut.

La Marche Funèbre, la Contredanse, le Cantabile, le Souvenir de Paganini ou le Nocturne en do dièse mineur op posth., sont fredonnés par un diseur de rêve qui égrène les notes et recherche dans les harmonies les plus subtiles toute une palette de sonorités, tantôt apaisées, tantôt éclatantes, éclairées par un jeu félin et intériorisé (Barcarolle). En bis, la Berceuse, immatérielle, et une Mazurka en apesanteur et d’une nostalgie infinie, exercent un envoûtement à l’image de ce pianiste rare et hors du temps qui sait dérouler la Polonaise-Fantaisie comme le fil des Nornes. Une aventure dont nul ne peut sortir indemne

Michel Le Naour

Paris, Théâtre des Champs-Elysées, 12 avril 2010

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Photo : DR
 

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