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Compte-rendu : Décapante mise en perspective - Yoel Levi et George Pludemacher jouent Stravinski et Xenakis


Le cycle Stravinski/Xenakis proposé par la Cité de la musique permet un large tour d’horizon sur des œuvres majeures du 20ème siècle tout en offrant une confrontation très instructive sur les courants qui ont animé la musique de cette époque fertile en contrastes. L’Orchestre National d’Ile-de-France et son chef principal Yoel Levi (photo) débutent la soirée par une mise en bouche avec la Suite n°2 pour petit orchestre de Stravinski, d’allure primesautière, volontiers iconoclaste, mais qui manque d’impulsion sous une direction précise, trop peu soucieuse d’humour et de fantaisie. En revanche, dans l’exécution du fantasque Capriccio pour piano et orchestre sous les doigts agiles et vifs de Georges Pludermacher qui sait, quand il le faut, instiller poésie et sensibilité (Andante rapsodico), l’orchestre se met au diapason du soliste, associant rythme et élan dans un geste unitaire indispensable à la cohésion de l’œuvre.

Le pianiste se montre tout aussi impressionnant de concentration, de densité, à l’épreuve de Synaphaï de Iannis Xenakis, où sa virtuosité (la cadence est époustouflante) triomphe de la texture écrasante d’une riche orchestration. Le bref mais suggestif Metastasis (1955), partition emblématique de l’avant-garde musicale présente à Donaueschingen, est d’une mobilité, d’une fluidité où chacun des instrumentistes de l’orchestre (en particulier les cordes jouant des glissandi) rend avec beaucoup d’efficacité les palpitations, loin d’une sécheresse d’interprétation trop intellectuelle.

En seconde partie, la Symphonie de psaumes de Stravinski (1930), conduite sans partition par Yoel Levi, est animée d’un souffle généreux (les chœurs de l’Orchestre de Paris participent à ce sentiment), préférant une vision discursive et une approche immédiate à une démarche intellectuelle et hiératique. Malgré quelques baisses de tension, de légers déséquilibres entre voix et orchestre, la dimension spirituelle trouve tous ses droits à la fin de ce concert d’une indéniable plénitude.

Michel Le Naour

Paris, Cité de la Musique, 16 octobre 2009

Programme de la Cité de la musique

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Photo : DR

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