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Compte-rendu : Berlin hier et aujourd’hui - Simon Rattle et les Berliner Philharmoniker

Les deux concerts de l’Orchestre Philharmonique de Berlin à Pleyel, sous la direction de Sir Simon Rattle, constituaient l’aboutissement d’une tournée américaine et européenne. Première œuvre inscrite au programme, San Francisco Polyphony de György Ligeti (créée par Seiji Ozawa en 1975) prouve d’entrée de jeu la qualité d’un orchestre capable d’aérer le tissu harmonique, de définir avec clarté les lignes. En revanche, le Concerto pour piano n°4 de Beethoven, conduit d’une manière très ascétique par la pianiste japonaise Mitsuko Uchida, ne bénéficie pas toujours d’un accompagnement approprié. Face à une soliste plus mozartienne que beethovénienne, le chef appesantit un discours qui ne s’assouplit que dans le Rondo vivace final bondissant et ludique.

Après l’entracte, la 2e Symphonie de Sibelius présente une construction très aboutie et d’un romantisme contrôlé. Elle puise au sein du matériau en expansion cette énergie concentrée qui se résout dans la coda finale, saisissante de puissance éruptive.

Le lendemain, l’Ouverture des Maîtres Chanteurs jouit là encore d’une définition très fine des plans sonores rendus avec une précision époustouflante. La Symphonie de chambre n°1 de Schoenberg, dans sa version pour grand orchestre, perd en acuité ce qu’elle gagne en expressionnisme. Les musiciens allient virtuosité dans les phrasés et capacité à dégager les harmonies les plus touffues.

On restera toutefois plus dubitatif sur une interprétation très personnelle de la 2e Symphonie de Brahms. Le sens du mystère, le questionnement, la pulsation élégiaque et la lumière sensuelle sont évincés au profit d’une recherche sur les timbres (superbe tenue des bois), une transparence de la ligne et une agitation du discours. L’attention portée aux détails instrumentaux fait parfois perdre de vue le sens de la grande forme. Il n’est pas interdit de rêver, dans cette symphonie pastorale, à une interprétation plus voluptueuse où le souffle de la tension s’allie à la tendresse élégiaque. L’opulence de l’orchestre, ses ressources en apparence inépuisables continuent d’impressionner, bien que sa sonorité globale tende aujourd’hui à se normaliser. Une impression que l’on n’éprouve ni avec l’Orchestre du Gewandhaus de Leipzig, ni avec la Staatskapelle de Dresde.

Michel Le Naour

Paris, Salle Pleyel – 26 et 27 février 2010

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Photo : DR
 

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