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Arcadi Volodos en récital au Festival L’Esprit du Piano de Bordeaux – Soirée d’exception - Compte-rendu
Avec dix concerts répartis en l’espace de neuf jours, la 6ème édition de l’Esprit du Piano aura attiré plus de 9500 spectateurs et confirmé la solide implantation du festival dans le paysage musical bordelais. De Lang Lang à Bruno Rigutto, Sandro de Palma ou Guillaume Coppola (avec le Chœur de l’Opéra de Bordeaux), de Denis Kozhukhin à Elena Bashkirova, mais aussi Edouard Ferlet et Chilly Gonzales, l’affiche traduisait le goût de la diversité et l’ouverture propres à Paul-Arnaud Péjouan, fondateur et directeur artistique de la manifestation.
Par ailleurs co-directeur artistique du Festival Piano en Valois d’Angoulême (avec Jean-Hugues Allard), il a été à l’origine, il y a bien des années maintenant, du premier récital français d’Arcadi Volodos.
C’était l’époque des ébouriffants débuts du Russe et d’un CD de transcriptions (Sony) qui avait fait grand bruit. Depuis, pour paraphraser la célèbre métaphore lisztienne, Volodos (né en 1972) a brisé sa chrysalide de virtuose pour laisser s’épanouir une personnalité musicale hors du commun et un jeu d’un niveau technique inapprochable. Avec une trentaine d’apparitions par an, il est l’un des interprètes les plus rares qui se puisse trouver. L’Esprit du Piano 2015 a eu le privilège de l’accueillir pour son concert de clôture.
Transcription du thème et variations du Sextuor op. 18 de Brahms : la sonorité de bronze va de pair avec une compréhension intime de la polyphonie. Volodos sait timbrer chacune des voix restituant la pièce avec la même évidence que si l’on avait affaire à l’original. On poursuit avec Brahms et ses Klavierstücke op.76, cahier relativement rare en concert et pourtant parmi les réalisations les plus essentielles de sa production piano. Il y a longtemps que, comme pour le reste du programme de ce récital bordelais, Volodos fréquente un ouvrage avec lequel il entretient une saisissante proximité. D’une palette aux teintes sombres mais toujours renouvelées, il peint un univers poétique pétri de non-dits avec une subtilité à laquelle l’acoustique de l’Auditorium rend totalement justice. L’auditoire retient son souffle, bouleversé par un monologue secret et hypnotique.
L’entracte apporte un moment de respiration bienvenu, avant que l’artiste ne nous embarque dans la Sonate D. 960 de Schubert. On n’est pas près d’oublier cet Andante sostenuto d’une noirceur sans larmes, d’une tension presque insoutenable, à l’image d’une conception dont l’unité d’ensemble fascine. Exempte de toute théâtralité, comme de toute sentimentalité, cette si bémol majeur vous tient gorge nouée jusqu’à l’issue de l’Allegro ma non troppo, d’une urgence inouïe. Tragique, au sens propre du terme.
En bis, Schubert, Mompou, Vivaldi/Bach et Lecuona viennent couronner une soirée d’exception.
Alain Cochard
Bordeaux, Auditorium, 25 novembre 2015
Photo © Uwe Arens
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