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30e Festival International de Colmar – L’esprit de famille – Compte-rendu

Avec une fidélité qui ne se dément pas, Vladimir Spivakov a choisi d’honorer Evgeny Kissin lors du 30e Festival international de Colmar, un rendez-vous estival dont le pianiste est depuis longtemps un habitué. Comme à l’accoutumée, Spivakov (directeur artistique du festival alsacien) a fait appel aux forces de l’Orchestre National Philharmonique de Russie – phalange dont il est le chef principal – au sein d’une riche programmation qui, outre la partie symphonique, aura fait la part belle aux récitals, à la musique de chambre et même à l’opéra (avec version de concert remarquée d’Eugène Onéguine.

Evgeny Kisssin © DR

Dans la Symphonie n° 2 de Rachmaninov (1908), les musiciens sont en terrain de connaissance et savent extraire avec ferveur lyrisme et émotion. L’interprétation narrative de Spivakov ne manque pas de souffle et recherche davantage l’efficacité au détriment parfois de la subtilité : il est vrai que l’acoustique du lieu privilégie plus les cordes et les percussions que la petite harmonie. Impérial, Kissin entonne le Concerto n° 2 du même compositeur avec fébrilité mais trouve rapidement ses marques et se love dans l’accompagnement enveloppant de l’orchestre qui plonge au tréfonds de l’âme slave. Virtuosité sans faille, aisance digitale, sens du discours, Kissin tel qu’en lui-même, avec en bis un tellurique Prélude n° 1 en ut dièse mineur qui soulève l’enthousiasme d’un public - standing ovation !
 
En matinée, concert de musique de chambre dans la salle du Koifhus – l’ancienne Douane de Colmar, de style Renaissance. Dans les Variations sur un thème de La Flûte enchantée pour violoncelle et piano de Beethoven, Edgar Moreau (qui, rentré des Etats-Unis, remplace au pied levé Bruno Philippe souffrant) et Aurèle Marthan paraissent se chercher. On retiendra davantage le charme de la flûtiste Ekaterina Kornishina, d’une agilité et d’une fluidité à fleur de lèvres dans la Sonate de Poulenc et la Fantaisie de Fauré.
 
Le lendemain, à l’église Saint-Matthieu, le jeune pianiste américain George Li (photo, 23 ans), Deuxième Prix du Concours Tchaïkovski en 2015, aborde sans frémir deux opus incontournables de la musique concertante russe. Sa technique maîtrisée ne suffit pas toujours à donner sa pleine cohérence à la Rhapsodie sur un thème de Paganini de Rachmaninov jouée de manière brillante. En revanche, le Concerto n°1 de Tchaïkovski ne présente aucune difficulté pour lui, qu'il s'agisse de l’éclairage des plans sonores, du panache et de la dimension spectaculaire qu’accuse la direction généreuse du chef.
Rendez-vous l’an prochain à Colmar pour un 31e Festival en hommage à Claudio Abbado.
 
Michel Le Naour

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Colmar, Eglise Saint-Matthieu, Salle du Koifhus, 13 et 14 juillet 2018

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