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Les 80 ans de l’Orchestre National de France - Riccardo Muti en majesté - Compte-rendu

L’Orchestre National de France a fêté ses quatre-vingts printemps au Théâtre des Champs-Elysées, sous la baguette aussi précise qu’élégante de Riccardo Muti. Certains ont remarqué qu’il n’a pas célébré l’événement sous la direction de son actuel patron. Moi, ce qui m’interroge, compte tenu de l’évidente et ancienne entente artistique et affective entre le National et Muti, c’est que celui-ci n’en ait pas pris la tête lorsque l’occasion s’en est présentée à son départ de la Scala de Milan.
 
L’administration française est coutumière de ce genre de ratage. Ainsi fit-elle capoter des négociations avec l’immense Mariss Jansons en lui refusant un contrat de dix ans avec l’Orchestre de Paris - le maestro letton souhaitait que ses enfants puissent effecteur leurs études dans la capitale - ; ces messieurs n’avaient, paraît-il, pas de formulaire idoine ! Depuis, Jansons se console avec le Concertgebouw d’Amsterdam…
 
L’ouverture de Guillaume Tell a constitué un hommage clair à Paris où Rossini écrivit cet ultime opéra avant d’y prendre une retraite de près de quarante ans. Ce fut aussi dans la tête du chef napolitain l’occasion de mettre en valeur l’école française de violoncelle comme la petite harmonie du National. Toute cette page célèbre fut d’ailleurs un modèle d’interprétation où chacun ne rêvait que de faire plaisir à l’autre dans un assaut de virtuosité maîtrisée.
 
Suit un Poème de l’amour et de la mer de Chausson où le temps a décanté toutes les influences européennes, et d’abord wagnériennes, au profit d’une musique si typiquement française : ainsi l’orchestre n’est-il que chatoiement impressionniste à la manière de Debussy. Et qu’importe les mots nunuche de Bouchor, dont la grande Bernarda Fink distille admirablement les notes…
Après l’entracte, Muti se fait plaisir avec une 3ème Symphonie de Scriabine qu’il est bien le seul à considérer comme un divin… poème. Mais avec un tel chef et un orchestre aussi motivé rien ne peut être indifférent !
 
Jacques Doucelin
 
Paris, Théâtre des Champs-Elysées, 13 mars 2014
(Concert retransmis en direct sur France Musique)

Photo © DR
 

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