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Clément Mao-Takacs et le Secession Orchestra à la Cité de la musique – Visages de Chostakovitch – Compte rendu

 

Il y a du Chostakovitch dans l’air des concerts parisiens en ce moment. Et nul ne s’en plaindra ! Quelques jours après la mise en regard Chostakovitch-Mozart proposée par Alexander Melnikov et l’Orchestre de Chambre de Paris au théâtre des Champs-Elysées, c’était au tour de Clément Mao-Takacs (photo) et son Secession Orchestra de donner leur premier concert à la Philharmonie de Paris dans un programme particulièrement bien construit – ce qui n’est pas pour surprendre de la part de ce chef – qui éclairait divers visages d’un compositeur dont 2025 marque le cinquantenaire de la disparition.
 

© Amandine Aubrée – Toï Toï Paris

 
On associe généralement son nom à des climats très sombres. Et c’est sous ce visage qui s’offre en début de soirée avec la Symphonie de chambre op. 110a, adaptation pour orchestre à cordes par Rudolf Barchaï du 8Quatuor. Clément Mao-Takacs opte pour une conception moins radicalement noire et violente que ce que à quoi l’on est accoutumé dans cette pièce. L’hommage de l’auteur « aux victimes du fascisme et de la guerre » prend ici l’allure d’un souvenir terrible dans un matin blême. Choix parfaitement défendable mais d’un impact un peu diminué par l’acoustique de la salle des concerts qui ne rend pas pleinement justice aux nuances de gris recherchées par le chef et ses musiciens.
 
Suit le Concerto pour piano n°1, pour lequel David Kadouch et Romain Leleu rejoignent le Secession Orchestra. Autant dire des solistes en terre d’élection dans une partition dont ils restituent la variété et les contrastes avec beaucoup d’aisance et de fluidité. En sachant aussi creuser les ambiguïtés de la musique avec la complicité du chef. Bel accueil de l’auditoire : final bissé, auquel Kadouch ajoute le 10des Prélude op. 34.

 

© Amandine Aubrée – Toï Toï Paris

 
Autre arrangement de Barchaï pour ouvrir la seconde partie avec la Symphonie de chambre op. 83a, issue du 4Quatuor. Clément Mao-Takacs tire parti des couleurs offertes par la présence des vents avec une grande intelligence – et un évident plaisir. Difficile de résister à l’Andantino et son prenant solo de hautbois ...
De tous les coloris de sa formation, il joue aussi pour offrir le plus bel écrin à Marie-Laure Garnier. Une chanteuse qu’il connaît et accompagne depuis ses débuts. Entente remarquable dans les Six Mélodies sur des poèmes de Marina Tsvetaïeva dont la soprano s’empare avec un matériau vocal d’une richesse incroyable et conduit avec l’aide du chef jusqu’à l’acmé dramatique du À Anna Akhamatova conclusif. Saisissant et profondément émouvant.
 
Assez de drame, c’est par le Chostakovitch le plus souriant que Clément Mao-Takacs et ses musiciens ont décidé de terminer avec la suite symphonique tirée de l’opérette Moscou, quartier des cerises. Une conclusion irrésistible de verve, de relief et de mordant où l’harmonie du Secession Orchestra fait des merveilles !
 
Alain Cochard
 

Paris, Cité de la musique, Salle des concerts, 9 octobre 2025

 
Photo © Amandine Aubrée – Toï Toï Paris

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