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Paris - Compte-rendu : Pierre Laurent Aimard pianiste orchestre


Le Domaine privé du pianiste Pierre Laurent Aimard est vaste et ouvert, de Bach à Messiaen en passant par Ligeti et Kurtag, comme le prouve le cycle de concerts que lui consacre la Cité de la Musique. Ce que l’on retiendra des deux soirées auxquelles on a assisté c’est qu’à 51 ans ce merveilleux pianiste prend son essor de chef sans rien abdiquer de ses qualités de rigueur et de musicalité. Le voir jouer et diriger du clavier l’Orchestre de Chambre d’Europe constituait une gageure si l’on songe qu’il a conjugué en un seul concert les deux écoles de Vienne, Haydn et Mozart encadrant de fragiles miniatures de Schoenberg et Webern !


Le Haydn Philosophe de la 22e Symphonie ouvre le ban dans la gaîté avant trois mystérieuses Pièces pour petit orchestre et Six Petites Pièces pour piano seul de Schoenberg suivies des Six Bagatelles pour quatuor à cordes et des Cinq Pièces pour petit orchestre de Webern. Aucune rupture : que de la musique pure. Les Ramifications de son cher Ligeti ont servi de porche au 23e Concerto pour piano de Mozart, le plus maçonnique de tous avec cet incroyable Adagio, vraie méditation sur la mort et la déréliction de l’homme. Pierre Laurent Aimard y est magnifique et poignant. Il a trouvé enfin la totale complicité avec l’orchestre, celle qui lui manquait tant avec Nikolaus Harnoncourt dans Beethoven.

La veille, c’est Susanna Mälkki qui dirigeait l’intercontemporain dont Aimard fut le premier pianiste après avoir remporté le Prix Messiaen. C’est l’occasion de réentendre les magnifiques Scènes d’un roman de György Kurtag avec la soprano Maria Husmann et les Trois Inventions du Britannique George Benjamin, l’un des tout derniers élèves de Messiaen. Une création mondiale était au programme avec …as I am…, commande de l’intercontemporain au Japonais Dai Fujikura. Portée par la superbe mezzo Loré Lixenberg , l’œuvre témoigne à la foi d’un beau lyrisme et d’une décontraction apprise à Londres. Final sur les sommets avec les Sept Haïkaï de Messiaen, vrai festival de chants d’oiseaux nippons dans lequel Pierre Laurent Aimard brille de tous ses doigts.

Jacques Doucelin

Cité de la Musique, les 2 et 3 avril 2008

Programme détaillé de la Cité de la musique

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