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Candide à l’Opéra de Nancy - Retour aux sources - Compte-rendu
Jean-Luc Choplin en a administré brillamment la preuve au Châtelet : la comédie musicale américaine échappe à l’esprit français, car elle relève de l’esthétique anglo-saxonne. A la tête de l’Opéra national de Lorraine, Laurent Spielmann a fait le même constat et confié lui aussi son nouveau Candide de Bernstein, présenté dans la bonbonnière de Nancy, à une équipe américaine et britannique qui a mené le spectacle au triomphe. Sous l’effet conjugué d’une mise en scène très serrée du Britannique Sam Brown et des surtitres français, le public réagit et rit comme à une pièce de Feydeau.
La demi-douzaine de protagonistes, tous anglo-saxons eux aussi, ont témoigné d’un même entrain scénique et musical, de ce sens de l’équipe qui caractérise nos voisins d’outre-Manche. En meneur de jeu, saluons un remarquable comédien britannique Michael Simkins qui sait tout faire, et d’abord mettre les spectateurs dans sa poche ! Car Leonard Bernstein savait ce que la comédie musicale doit à la revue : les numéros s’enchaînent comme autant de tableaux vivants et pittoresques, mais pas trop. La décoratrice anglaise Annemarie Woods suggère tout en gardant la distance : de Cadix à Venise, de Lisbonne à Paris, le pinceau reste léger. Tout juste un décor de théâtre…
Mais il n’est pas vide ! Grâce d’abord au jeune chef américain Ryan McAdams qui connaît son Bernstein sur le bout de la baguette et sait jusqu’où ne pas aller trop loin : le grand chef classique n’est jamais bien loin chez Lenny, même quand il s’encanaille à la manière d’un Poulenc. Et puis, sous l’enveloppe riante, il y a le sujet très sérieux du McCarthysme que le compositeur veut dénoncer sous le masque du célèbre conte de Voltaire : le monde n’est pas si beau, il n’y a pas de quoi rire. A la fin, la nostalgie s’empare de l’œuvre.
Cela passe dans le jeu et le chant du ténor texan Chad Shelton, Candide, et de sa Cunégonde suédoise Ida Falk Winland, comme de la Paquette de la soprano galloise Gwawr Edwards ou du Maximilien du baryton américain Kevin Greenlaw. Orchestre et chœurs maison sont au diapason de cette version originale de Candide dont on aimerait souhaiter qu’il voyage à travers l’Hexagone.
Jacques Doucelin
Nancy, Opéra national de Lorraine, 8 décembre 2013
Photo © Opéra national de Lorraine
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