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Artaserse à Nancy - Une ébouriffante réussite - Compte-rendu
Dans la foulée de leur enregistrement discographique, Diego Fasolis et son aéropage de contre-ténors emmènent en tournée l'Artaserse de Vinci. Seul l'Opéra de Lorraine a cependant maintenu la présentation en version scénique.
Injustement oublié, l'ouvrage est le chef-d'œuvre de son auteur mort prématurément, et un archétype du style napolitain qui fait la part belle aux pyrotechnies vocales, redoutables pour les chanteurs autant que les metteurs en scène. Car ces airs relèvent davantage du portait d'affects que d'une dramaturgie crédible.
On peut certes discuter les choix esthétiques de la scénographie – un plateau tournant criblé comme une cible, des panneaux mobiles reproduisant une perspective de colonnes et un tableau caravagesque – selon que l'on considère éculée cette mise en abyme du théâtre se payant d'homonymie avec l'homme de Vitruve en toile de fond, ou qu'on lui reproche ses excès visuels. Mais la clarification réussie par Silviu Purcărete force un minimum de respect, d'autant qu'il parvient à animer les tunnels de récitatifs, rendant justice à un premier acte riche en rebondissements. Sans compter les désopilantes robes et plumes en forme de cygne dont sont affublées Mandane et Semira.
Suivant les prescriptions en vigueur à l'époque au Saint-Siège, la distribution est ainsi exclusivement masculine, et fait entendre une diversité de contre-ténors qui a peu d'égal. Dans le rôle-titre, Philippe Jaroussky démontre une fois de plus sa grande musicalité auréolée d'éther, soulignant l'instabilité du personnage – sorte de Titus un rien hystérique. S'il a laissé la première place à son collègue français, Max-Emanuel Cencic ne se trouve nullement relégué dans l'ombre et évolue avec une aise déconcertante dans la tessiture de Mandane, au point que la voix en oublie les stridences décelées par le passé. Avec son timbre artificiel qui lui donne des allures de contralto – on songe parfois à la grande Nathalie Stutzmann – Franco Fagioli (Arbace), affiche un héroïsme aussi étourdissant qu'intelligent. Découvertes éblouissantes avec la Semira diaphane de Valer Barna Sabadus et suavité pleine de naturel de Yuriy Mynenko (Megabise). Seul l'Artabano de Juan Sancho divise quelque peu avec ses aigus virtuoses mais ingrats – mais la laideur n'est-elle pas le tribut des méchants ? Tout en félinité, Diego Fasolis insuffle au Concerto Köln un dynamisme souple et jamais caricatural.
Gilles Charlassier
Vinci : Artaserse – Opéra de Lorraine, Nancy, 2 novembre, prochaines représentations les 4, 6, 8 et 10 novembre 2012
Et en tournée en version de concert :
Theater an der Wien, Vienne, le 20 novembre 2012
Opéra de Lausanne, les 23 et 25 novembre 2012
Théatre des Champs Elysées, les 11 et 13 décembre 2012
Opéra de Cologne, 17, 19 et 27 décembre 2012
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Photo : Opéra National de Lorraine
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