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5ème Festival Contrepoints62 - Une interview de Sébastien Mahieuxe, directeur artistique

Fort d’un très riche patrimoine organistique, le département du Pas-de-Calais s’est tout naturellement appuyé sur celui-ci pour bâtir un festival : Contrepoints62. Son directeur artistique, Sébastien Mahieuxe, répond à concertclassic tandis que la 5ème édition démarre le 17 septembre.

 Quel est la singularité du Festival Contrepoints62 ? 

Sébastien MAHIEUXE : Le sous-titre de Contrepoints62 est « le festival des orgues du Pas-de-Calais » ; la manifestation est donc centrée sur ce patrimoine, très riche dans ce département. On y dénombre un total de 156 orgues. Tous ne sont évidemment pas formidables ni en état de marche, mais dans cet ensemble ont trouve des instruments exceptionnels. 26 sont classés, parmi lesquels figure notamment le grand orgue de la Cathédrale de Saint-Omer, l’une des plus belles réalisations de Cavaillé-Coll dans un édifice qui mériterait d’être plus connu qu’il ne l’est (on peut y admirer une très belle descente de croix de Rubens). A côté des orgues des cathédrales, ceux des campagnes réservent de belles surprises aussi car, en l’absence de moyens pour entreprendre des travaux, ils ont été souvent préservés de toute dénaturation. C’est le cas par exemple à Auxi-le-Château qui possède un orgue baroque français intact, restauré il y a une dizaine d’années, et qui sonne vraiment comme au XVIIIe siècle. Comme nous nous situons à la frontière des Flandres, on trouve aussi dans la petite église de Nielles-lès-Ardres un orgue XVIIe flamand mésotonique absolument fabuleux, avec un buffet très intéressant. Rien d’un hasard donc si Contrepoints62 démarre durant le week-end des Journées du Patrimoine.

 Comment avez-vous construit votre programmation ? 

S. M.  : Au-delà de la mise en valeur du patrimoine organistique, mon souci est de faire dialoguer l’orgue avec ce à quoi il est le plus naturellement associé : la voix - le plain-chant dialogue avec le grand orgue dans la tradition catholique. J’ai bien sûr tenu compte des caractéristiques des instruments, mais aussi de l’atmosphère des lieux où ils se trouvent. La cathédrale de Boulogne-sur-Mer, avec son dôme, m’a par exemple donné envie d’y entendre de la musique italienne, romaine, exaltante. Etant donné que l’orgue est de style baroque allemand, il m’a paru intéressant de travailler autour du Dixit dominus de Haendel (par le King’s Consort), entouré d’œuvres de Bach (des transcriptions de Vivaldi jouées par Benjamin Alard) et de Vivaldi (Gloria). Je me suis amusé aussi à « détourner » un instrument associé à un répertoire très traditionnel : le jazzman Andy Emler donnera un programme « Jazz’Orgue ! » à Wimereux.

Le passé côtoie parfois le présent, la création : j’ai demandé à Pierre Pincemaille d’improviser à partir de la Missa in illo tempore de Monteverdi, qui aura été interprétée auparavant par l’Ensemble Stile antico. Un projet qui a beaucoup séduit Pierre Pincemaille ! Par ailleurs, pour la première fois cette année, le festival a passé une commande à un compositeur, Olivier Penard. Son œuvre sera créée lors du concert d’ouverture à Saint-Omer, donné par des voisins : le Chœur et l’Orchestre de la Radio Flamande.

 J’imagine que le carrefour européen où vous vous situez influe sur la fréquentation du festival… 

S.M.  : Nous accueillons beaucoup de public local d’abord, mais aussi beaucoup de Belges et d’Anglais. Contrepoints62 se veut un festival populaire. Il est le fruit d’une volonté politique : le président du Conseil Général, Dominique Dupilet – un grand mélomane auquel il n’a pas été nécessaire de souffler l’idée du festival -, considère l’orgue comme un vrai instrument populaire, en se souvenant que, jadis, il était pour beaucoup de gens le seul moyen de contact avec de la musique savante. Dans les villages ont ressent toujours aujourd’hui la fierté des habitants pour « leur » orgue.

 A Auxi-le-Château, ils seront d’autant plus fiers que vous y avez invité Gustav Leonhardt… 

S.M.  : Gustav Leonhardt adore découvrir des instruments. Il ne connaissait pas celui d’Auxi-le-Château. Je lui ai envoyé le descriptif et il a accepté de venir y donner un programme qui convient tout à fait à cet orgue, de style français mais avec un côté wallon ; construit au XVIIIe siècle par le facteur Adrien Carpentier, originaire d’Arras.

 Comment se passe le concours d’orgue qui a lieu parallèlement au festival ? 

S. B.   : Le Concours Pierre de Manchicourt (il a lieu tous les deux ans) est réservé à des organistes de moins de vingt-sept ans et se déroule sur l’orgue de l’église Saint-Vaast à Béthune : un très bel instrument récent de style nord-allemand, parfait pour Buxtehude ou Bach. Trente-cinq jeunes organistes seront cette fois en compétition devant un jury présidé par Lorenzo Ghielmi.

Propos recueillis par Alain Cochard, le 2 septembre 2010,

Contrepoints62
Le Festival des orgues du Pas-de-Calais
Du 17 septembre au 10 octobre 2010

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