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​Acis et Galatée sous la direction de Leonardo García Alarcón à Genève – Haendel à la lumière de Mozart – Compte-rendu

Journée bien occupée que celle du 12 novembre pour Leonardo García Alarcón. Outre la présentation de la saison 2024 de La Cité Bleue Genève (1) au Bâtiment Forces Motrices, le chef était ensuite attendu sur la scène de cette même salle pour Acis et Galatée dans l’orchestration de Mozart. C’est à la demande du Baron van Swieten, que l’auteur de Don Giovanni entreprit, en novembre 1788, de réorchestrer l’ouvrage de Haendel. À un moment donc où, comme le soulignaient Wyzewa et Saint-Foix, le musicien « atteint le summum de ses facultés de création artistique » – une démarche que le compositeur autrichien renouvela en mars de l’année suivante en s’attaquant au Messie.
 

Julie Roset (Galatée) © François de Maleissye-Cappella Mediterranea

Si le livret d’Acis et Galatée fut traduit en allemand lors de l’intervention mozartienne, Alarcón a pris le parti de rester fidèle à l’anglais. Une partition dans laquelle il se meut avec d’autant plus d’aisance qu’il l’a dirigée en septembre 2022 à Amsterdam lors d’une soirée qui marquait ses débuts avec l’Orchestre du Concertgebouw.
 

Mark Milhofer (Acis) © François de Maleissye-Cappella Mediterranea
 
À Genève, des instrumentistes issus de l’Orchestre Chambre de Genève et de la Cappella Mediterranea font équipe pour une version mise en espace qui, par sa prégnance musicale et son relief théâtral, démontre qu’Alarcón sait tirer tout le parti dramatique offert par l’éclairage mozartien ; la richesse d’une orchestration où les vents – dont cette clarinette si chère au cœur du compositeur – jouent un rôle essentiel. Ce avec un tact infini qui préserve le charme arcadien de l’ouvrage tout en lui apportant la densité du XVIIIe siècle finissant.
 

Staffan Liljas (Polyphemys) © François de Maleissye-Cappella Mediterranea
 
Côté distribution, tout concourt à la réussite de l’entreprise.  D’une fraîcheur et d’une aisance vocales irrésistibles, Julie Roset offre une touchante Galatée qui unit présence et poésie en une musicalité de chaque instant. Avec l’excellent Mark Milhofer en Acis, le choix d’un ténor d’un âge plus mûr que ce à quoi l’on pourrait s’attendre a priori dans le rôle du berger s’avère pertinent et participe de la mise en valeur de l’apport mozartien. Rien de surjoué dans Polyphemus du Suédois Staffan Liljas, mais une densité du matériau vocal et une justesse d’expression qui, ajoutées à l’efficacité de la mise en espace, donnent tout son poids au rôle. Choix luxueux, Valerio Contaldo est un Damon idéal, tandis que Fabio Trümpy offre un Coridon d’une remarquable finesse, Maud Bessard-Morandas, Leandro Marziotte, Raphaël Hardmeyer apportant leur précieux concours dans les parties chorales.
 

© François de Maleissye-Cappella Mediterranea
 
La réunion pour cet Acis et Galatée (inscrit dans le cadre du Festival « Hors les murs » de La Cité Bleue) de vingt-cinq musiciens issus pour une moitié de la Cappella Mediterranea, pour l’autre de l’Orchestre de Chambre de Genève avait valeur de test pour Leonardo García Alarcón trois mois avant l’Idoménée programmé au Grand Théâtre de Genève du 21 février au 2 mars.(2) Un test particulièrement concluant tant par l’homogénéité du résultat, que la souplesse et l’intelligence avec laquelle la formation ainsi constituée prête ses couleurs à Alarcón, peintre inspiré des sentiments humains. On voudrait citer chacun ; on se limitera à une mention spéciale pour Jean Brégnac et Olivier Riehl (flûtes), François Gillardot et Michel Westphal (clarinettes), Matthieu Siegrist et Pierre Burnet (cors).
 
Alain Cochard

 

(1) www.concertclassic.com/article/la-saison-inaugurale-2024-de-la-cite-bleue-geneve-devoilee-le-reve-de-leonardo
 
(2) https://www.gtg.ch/en/2023-2024-season/idomeneo-re-di-creta/
 
Haendel/Mozart : Acis et Galatée – Genève, Bâtiment des Forces Motrices, 12 novembre 2023.
 
Photo © François de Maleissye-Cappella Mediterranea

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