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Orchestre Philharmonique de Monte Carlo - Une ouverture symbolique

Le 20 septembre prochain, Yakov Kreizberg inaugurera sa seconde saison à la tête de l’Orchestre Philharmonique de Monte Carlo, la première qu’il ait pensée en totalité, avec la 3e Symphonie de Gustav Mahler, manifeste évident de sa volonté d’enrichir le répertoire de l’orchestre, suivant en cela le travail accompli par Marek Janowski, mais allant plus loin encore : le second concert de la saison, qui tombera pile pour le cinquantième anniversaire du chef russe (le 25 octobre) fera la part belle à Chostakovitch avec l’irrésistible doublé des 6e et 9e Symphonies, partitions brèves où le sarcasme le dispute au désespoir. Programme ambitieux, que viendra adoucir pour le public monégasque, intercalé comme par magie, le 20e Concerto de Mozart avec cet artiste majeur qu’est Philippe Bianconi, pianiste de grande venue, musicien pour les musiciens, qui attend toujours qu’une salle parisienne l’invite en récital ou en concerto (cette année Toulouse le verra dans un splendide programme Chopin à Piano aux Jacobins). (1)

Kreizberg c’est une baguette inflexible, un œil implacable, une énergie jamais extravertie toutes qualité de grande école (et de vraie tradition, il fut l’élève d’Ilya Musin), devenue trop rare chez les chefs d’orchestre ; il y a dans son art quelque chose de la hauteur de vue et de l’absolue exigence d’un Mravinsky, doublé par un souci de la narration qui revisite les arcanes des grandes partitions symphoniques et sait comme peu d’autre construire un récit.

A ce titre la Troisième de Gustav Mahler devrait lui aller comme un gant, avec son programme philosophique, ses éléments descriptifs, ses musiques entre chaos et nature. Quant à Chostakovitch il possède toutes les clefs de son univers, connaissance éloquente que le disque a déjà vérifiée plusieurs fois. Et à ce propos on ne peut que souhaiter l’entendre plus souvent dans le répertoire russe : les grands ballets de Stravinsky, les Symphonies de Prokofiev ou celles, toujours à découvrir, de Miaskovsky, semblent naturellement appariés à son art.

Ces deux concerts ouvrent une saison particulièrement attrayante. La 7e de Bruckner, la 4e de Mahler, la Turangalîlâ-Symphonie, la 11e de Chostakovitch, la 7e de Dvorak seront autant de satellites autour d’un projet ambitieux, une série de concerts dédiée à illustrer l’aventure des Ballets Russes et de Serge Diaghilev : L’Oiseau de feu, Petrouchka, Le Sacre du Printemps certes, mais aussi Daphnis et Chloé ou la Schéhérazade rimskienne se feront l’écho de cette singulière aventure artistique.

Et il faut espérer que le projet de l’Orchestre d’avoir enfin son propre label discographique permettra de documenter cette saison exceptionnelle au-delà des limites de la Principauté, outre que bien des archives passionnantes attendent d’être divulguées.

Un seul regret, que Yakov Kreizberg n’ait pas été invité par l’Opéra de Monte Carlo : ses tonitruantes saisons au Komische Oper de Berlin ont laissé des souvenirs vivaces. Il serait dommage que les lyricomanes du Rocher continuent d’ignorer cette autre face de son art.

Jean-Charles Hoffelé

DERNIERE MINUTE : Nous apprenons que Yakov Kreizberg, souffrant, ne sera pas en mesure de diriger les concerts des 20 sept. et 4 oct. et sera remplacé par un chef dont le nom n'est pas encore communiqué.

La Rédaction

(1) Le 9/09, au Festival Piano aux Jacobins / http://www.pianojacobins.com/

Mahler : Symphonie n°3 - Auditorium Rainier III, le 20 septembre 2009

Chostakovitch : Symphonies n°6 et 9, Mozart : Concerto pour piano n°20 (Philippe Bianconi, piano), Auditorium Rainier III, le 25 octobre 2009 Saison de l’Orchestre Philharmonique de Monte Carlo : www.opmc.mc

Photo : DR
 

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