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Marc Albrecht dirige les Gurre-Lieder - Clarté et passion - Compte-rendu


A l’instar de la Symphonie « des Mille » de Mahler, l’exécution des Gurre-Lieder de Schoenberg a toujours valeur d’événement. L’ampleur des effectifs requis (plus de 140 musiciens dans l’orchestre, une centaine de choristes, 6 solistes vocaux) impressionne par son gigantisme mais explique aussi pourquoi l’œuvre est si rarement jouée en concert.
L’Orchestre Philharmonique de Strasbourg, rompu au répertoire germanique au même titre que son chef Marc Albrecht (dont c’est la dernière saison à la tête de cette phalange), ne craint pas d’aborder cet immense vaisseau inscrit dans le sillage de Wagner et plus encore de Gustav Mahler ou d’Alexandre Zemlinsky.

L’histoire du roi Waldemar confronté à la mort de la jeune bien-aimée Tove tient du conte fantastique, atteignant in fine une dimension extatique proche de l’atmosphère contemporaine du Pierrot lunaire. Les interprètes des Gurre-Lieder imposent une conception faite de passion, de lyrisme, de poésie. Marc Albrecht parvient à dominer la pâte sonore, à insuffler élan et fougue tout en clarifiant les différentes strates sonores.

Les solistes montrent parfois quelques limites : Ricarda Merbeth (Tove) - qui remplace au pied-levé Christiane Iven - manque d’ampleur et de projection. Lance Ryan en Waldemar possède une stature et une vaillance dignes du héros désespéré, mais peine un peu dans les aigus. En revanche Anna Larsson, dans la magnifique déploration du lied de la colombe des bois, impressionne par son expressivité et sa somptuosité vocale. La brève intervention d’Albert Dohmen (le paysan) et celle d’Arnold Bezuyen dans la séquence totalement débridée de Klaus-le-Fou, ainsi que l’exaltation éruptive du sprechgesang de la récitante Barbara Sukowa (en dépit d’une amplification dérangeante) contribuent à la réussite des Gurre-Lieder des Strasbourgeois. Quant au Chœur Philharmonique de Brno, il se révèle parfait tant sur le plan de l’articulation que de la puissance.

Michel Le Naour

Paris, Salle Pleyel, 25 juin 2011

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Photo : DR

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