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Le Fou retrouvé ; l'Opéra de Landowski à Mogador

« Landowski lui-même, comme compositeur, se définissait, avec un sourire, de la tendance « centre droit ». D’avant-garde ou non, il composait « sa » musique, en disant avec cette musique ce qu’il avait à dire avec des moyens qui lui plaisaient qu’ils fussent « nouveaux » ou non, « inouïs » ou bien implantés dans la grande tradition » : ainsi Antoine Goléa définissait-il en 1980 la personnalité d’un créateur dont l’ouverture d’esprit continue d’ailleurs de vivre aujourd’hui grâce à l’association Musique Nouvelle en liberté dont il fut le fondateur.

Le théâtre du Châtelet et l’Orchestre de Paris unissent leurs forces pour rendre hommage à Marcel Landowski avec une nouvelle production de son opéra Le Fou. Il y a longtemps que la France n’a eu l’occasion de réentendre une partition qui constituait la deuxième incursion du compositeur dans le domaine lyrique cinq ans après Le Rire de Nils Halerius.

Créé à Nancy en février 1956 dans une mise en scène de Marcel Lamy et sous la direction de Jésus Etcheverry, Le Fou met en scène le personnage de Peter Bel. Ce savant constitue l’unique espoir d’une ville assiégée car il peut construire une machine de guerre susceptible de sauver ses compatriotes. « Toute l’histoire, confiait l’auteur, se déroule comme un examen de conscience entre sa responsabilité envers l’humanité toute entière et le sort, le salut de ses propres concitoyens. Finalement ce savant passera pour un traître aux yeux de son pays, parce qu’il refuse d’être le bourreau de l’humanité. »

D’aucuns ne voudraient faire rimer le nom de Marcel Landowski qu’avec conservatisme. La partition du Fou montre pourtant un compositeur remarquablement ouvert aux nouveaux moyens d’expression qu’il avait à sa disposition. Ondes Martenot, bande magnétique jouent en effet un rôle important dans l’ouvrage et Landowski estimait y avoir trouvé « un élargissement considérable du possible de l’expression. »

La querelle entre bouléziens et landowskiens appartient pratiquement à l’histoire ancienne désormais. Des traces en subsistent néanmoins ; jugements hâtifs, opinions guère étayées par une connaissance sérieuse des compositions importantes de Marcel Landowski.
On sait gré à ce spectacle mis en scène par Giuseppe Frigeni et dirigé par Pascal Rophé de redonner vie au Fou, et ce avec le concours d’une belle distribution constituée de François Le Roux (Peter Bel), Nora Gubisch (photo ci-contre), Laurent Alvaro, Jean-Pierre Furlan et Salomé Haller.

Landowski dispose en tout cas d’un atout par rapport à certains parangons d’avant-gardisme qui se sont aventurés dans l’opéra. La chose tient en peu de mots : Le Fou raconte une histoire…

Alain Cochard

Théâtre Mogador, du 2 au 8 février.

Photo : Philippe Grunchec
 

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