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Clôture du Festival de Radio France 2013 - La simplicité et le feu - Compte-rendu

Pour sa clôture, le Festival de Radio France et de Montpellier convie l’Orchestre Philharmonique et deux des pianistes français les plus légitimement réputés d’aujourd’hui, Bertrand Chamayou et Nicholas Angelich. En deux grands volets la soirée conduit du XVIIIe finissant à l’aube du siècle romantique. Très présent au cours d’une édition 2013, où on l’a auparavant entendu dans Schubert et Liszt aussi bien que dans Boulez et Berio (en compagnie de son non moins éclectique collègue Jean-Frédéric Neuburger), Bertrand Chamayou ouvre la première partie avec le Concerto n°23 en la majeur de Mozart, sous la baguette de Paul McCreesh. Mise en jambes un peu difficile pour les vents du Philhar qui ne brillent pas toujours par la netteté des attaques et la justesse de l’intonation. On pardonne ces petits moments de faiblesse une fois l’entrée du soliste effectuée. Avec autant de plénitude sonore que de clarté, Bertrand Chamayou manifeste la qualité la plus indispensable à cette musique, la simplicité. Porté par la direction vivante de McCreesh, il signe une interprétation sensible et d’une lumineuse intelligence.

Six ans après la mort de Mozart, Paul Wranitzky (1756)-1808) composa sa Grande Sinfonie caractéristique pour la paix avec la République française op 31. Un ouvrage méconnu qui trouve naturellement sa place à l’affiche d’un festival découvreur, bâti cette année sur le thème « Musique et Pouvoir ». Sans que l’on puisse parler de grand souffle, l’Histoire imprime sa marque sur la partition du compositeur bohémien, du premier mouvement « Révolution/ Marche des Anglais/Marche des Autrichiens et Prussiens » jusqu’au finale « Négociation de paix / Cris de joie pour la paix retrouvée ». Si elle n’est pas impérissable (le deuxième mouvement « Le sort et la mort de Louis XVI / Marche funèbre » manque de consistance), la musique se laisse déguster sous la battue alerte de McCreesh qui souligne avec tact la dimension très visuelle des 1er, 3ème et 4ème mouvements.

Directeur musical du Philharmonique jusqu’à fin de la saison 2014-2015, moment où il passera le relai à Mikko Franck, Myung-Whun Chung retrouve ses musiciens pour une fin soirée toute beethovénienne : 5ème Concerto et 5ème Symphonie. Dans « L’Empereur », Angelich a opté pour un piano plus mat – mais pas moins excellemment réglé - que celui utilisé auparavant par Bertrand Chamayou. Un choix qui sied idéalement au caractère d’un grand concerto symphonique dont le pianiste et le chef, en parfaite communion, tendent l’arche avec un lyrisme et un feu aussi intenses que dominés. Sous les doigts de l’ancien élève d’Aldo Ciccolini, la musique s’épanouit - splendide alliance d’autorité et d’humanité. Sonorité aux reflets d’ambre, poésie décantée, l’Adagio vise très haut : un véritable dialogue avec l’infini. Cheval de bataille de Chung, la Symphonie en ut mineur conclut le Festival 2013 avec un souffle, un équilibre et une virilité qui emportent l’enthousiasme d’un Opéra Berlioz plein à craquer. Moment d’émotion parmi les musiciens au moments des saluts car l’heure de la retraite à sonné pour trois des membres du Philhar : Emmnuel Burlet (piccolo solo), Jean-Marc Loisel (contrebasse 3e solo) et Catherine Lorrain (violon). Un départ en beauté.

Alain Cochard

Montpellier, le Corum, Opéra Berlioz, 25 juillet 2013.

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Photo : DR
 

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