Journal

23e Festival Sinfonia en Périgord - De Bach à Piccinni - Compte-rendu

Des extraits du Clavier Bien Tempéré par Kenneth Weiss (photo) et le rare Atys de Piccinni par les Solistes du Cercle de l’Harmonie : la journée du 30 août résumait à elle seule la nouvelle orientation que David Théodoridès donne à Sinfonia en Périgord. Si le festival demeure attaché à la musique baroque, plus que jamais au cœur de son projet artistique, il entend désormais s’ouvrir au répertoire classique et préromantique français – si riche de trésors méconnus - grâce au concours du Palazzetto Bru Zane.

Point destinée à la musique à l’origine, la salle du Centre de la Communication de Périgueux se révèle être - hasard heureux de la « polyvalence » - un lieu idoine pour le clavier et les formations de chambre : acoustique claire, naturelle, sans sécheresse, mais qui ne « pardonne » rien. C’est d’ailleurs là que CLAP, la structure municipale dont dépend Sinfonia en Périgord, organise une belle saison d’hiver (1) dont la prochaine édition démarre le 19 novembre avec le Trio Wanderer. C’est là aussi que Kenneth Weiss propose, sur un magnifique clavecin signé Philippe Humeau, un bouquet de dix préludes et fugues tirés du Livre I du Clavier Bien Tempéré. Approche admirable de clarté et de simplicité. Weiss n’est pas de ceux qui vous donnent l’impression d’ « aller à la messe », mais ne prend pas pour autant le parti de tutoyer Bach. On affaire avec lui à un vouvoiement aussi naturel qu’humain, qui laisse la musique s’épanouir de façon tout à la fois majestueuse et accessible, servie par un jeu remarquablement articulé, vivant, lyrique et d’une autorité jamais cassante.

Changement total de répertoire en soirée avec le Atys (1780) de Niccolo Piccinni (1728-1800) par Les Solistes de L’Harmonie menés du violon par Julien Chauvin. Familiers avec un ouvrage qu’ils ont donné en 2012 au Théâtre des Bouffes du Nord et plusieurs fois au cours de l’été qui s’achève, les jeunes instrumentistes ne convainquent pas moins qu’un homogène quatuor vocal où l’on salue le style de Philippe Talbot (Atys), la fraîcheur et la poésie de Chantal Santon (Sangaride), l’ardeur de Marie Kalinine (Cybèle) et l’autorité sans emphase d’Aimery Lefèvre (Coelenus). Tous sont parfaitement à leur affaire, portés par les couleurs, la présence suggestive, toujours pertinente du point de vue dramatique, des Solistes du Cercle de l’Harmonie aux petits soins avec les voix. Violon, alto, violoncelle, contrebasse, flûte, hautbois, basson : peu de monde auprès des chanteurs c’est vrai, mais des exécutants qui s’attachent à exploiter tout le « fruit » de leurs instruments respectifs plutôt qu’à chercher une puissance que le nombre ne leur permet pas. C’est à un émouvant opéra de chambre que l’on affaire ici. On accordera une mention particulière au traverso de Tami Krausz dont la sonorité charnue et ambrée contribue à quelques uns des moments les plus magiques d’une partition qui méritait amplement de sortir de l’oubli.

Alain Cochard

(1) Saison musicale Sinfonia 2013-2014 : www.clap-perigueux.com

Périgueux, Centre de la Communication, Nouveau Théâtre, 30 août 2013

> Vous souhaitez répondre à l’auteur de cet article ?

> Lire les autres articles de Alain Cochard

Photo : Arthur Forjonel
 

Partager par emailImprimer

Derniers articles