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Un librettiste nommé Verlaine


« Chabrier, nous faisions, une ami cher et moi,

Des paroles pour vous qui nous donnaient des ailes

Et tous trois(1) frémissions quand pour bénir nos zèles,

Passait l’Ecce Deus et le Je ne sais quoi ( …) »…

Dans le recueil « Amour » (1888), Paul Verlaine se remémorait ainsi son amitié et sa collaboration avec Emmanuel Chabrier au tout début de la carrière de ce dernier. C’est en effet entre 1863 et 1865 que le futur auteur d’España fit ses premiers pas dans le domaine lyrique à partir de deux livrets fournis par le poète : Fisch-ton-Kan et Vaucochard et Fils Ier. Les plus passionnés du musicien auvergnat connaissent peut-être l’enregistrement que Roger Delage réalisa pour Arion en 1992 de ces deux raretés de jeunesse(2).

Jérôme Deschamps a eu la bonne idée de mettre le premier d’entre eux - le plus drôle et loufoque aussi – au programme du dernier concert des « Rumeurs » qui entourent les représentations de L’Etoile. Vous ne savez pas que faire de votre soirée du 25 décembre ? Pourquoi ne pas aller goûter à ce Chabrier inconnu, d’autant que Fisch-ton-Kan sera dirigé par Benjamin Lévy à la tête de l’Orchestre de chambre Pelléas – des interprètes qui s’y connaissent en matière de musique légère ! -, avec le concours d’Olivia Doray(sop.), Jennifer Tani (mezz.), Vincent Ordonneau (tén.) et Roland Nédélec (bar.).

Du premier ouvrage lyrique de Chabrier on ne conserve qu’une version piano/chant. Roger Delage l’avait orchestrée pour les besoins de son enregistrement, mais c’est à Thibault Perrine, l’orchestrateur de la compagnie Les Brigands, que l’on doit la nouvelle version d’une charmante pochade lyrique, qui sera donnée (en version de concert mise en espace) aux côtés d’Une Education manquée.

Après avoir goûté aux aventures de Goulgouly, Fisch-ton-Kan, Kakao et Poussah, on trouve une opérette en un acte que Chabrier fit entendre en 1879, deux ans donc après L’Etoile. Le livret bien désuet de Leterrier et Van Loo peut rebuter aujourd’hui. Sachez que Jérôme Deschamps a entrepris de l’adapter avec la complicité de Pierre-Emmanuel Rousseau. Un peu de l’esprit des Deschiens dans les dialogues de Gontran de Boismassif, Hélène de la Cerisaie et Maître Pausanias… Voilà qui pourrait bien changer la donne.

Notez enfin qu’une orchestration de la Bourrée Fantasque par Thibault Perrine ouvre la soirée.

Alain Cochard

(1) Verlaine fait ici allusion à Lucien Viotti, son ancien condisciple au lycée Bonaparte – devenu par la suite lycée Condorcet.

(2) Arion 68252 (Avec Mireille Delunsch, Christian Mehn, Francis Dudziak, Jean-Louis Georgel, l’enregistrement inclut également Une Education manquée)

E. Chabrier : Fisch-ton-Kan / Une Education manquée

Opéra Comique

Mardi 25 décembre – 20h

Programme détaillé de l’Opéra Comique

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