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Rinaldo par la Co[opéra]tive à Quimper – Belle rencontre – Compte-rendu

Troisième production de la Co[opéra]tive (une initiative conjointe des scène nationales de Quimper, Dunkerque et Besançon et du théâtre impérial de Compiègne) (1) après les Noces de Figaro et Gianni Schicchi, Rinaldo de Haendel vient d’être présenté au théâtre de Cornouaille et promet de faire bien des heureux au cours de la grande tournée qu’il commence.

Thomas Dolié (Argante) & Aurore Bucher (Armida) © Pascal Perennec

C’est à Claire Dancoisne que l’on a eu l’excellente idée de faire appel pour l'ouvrage avec lequel Haendel entreprit sa triomphale conquête de Londres en 1711. La directrice de la compagnie dunkerquoise La Licorne n’avait jamais encore touché à la mise en scène lyrique et, loin de se laisser impressionner et déborder par l’enjeu, elle a su s’emparer de l’univers spectaculaire et chevaleresque de la partition (elle signe aussi la scénographie, aidée de Marie Liagre) pour l’habiter avec imagination et liberté – avec un peu d’impertinence aussi (l’univers hypra-codifié de l’opera seria s’y prête tellement bien ...).
Belle rencontre d’une artiste contemporaine et du répertoire baroque qui nous vaut une production « légère » comme les affectionne la Co[opéra]tive (itinérance oblige) (1), mais en rien étique tant elle regorge de trouvailles (2), de fantaisie, peuplée de tout un étrange bestiaire – et avec l’idée bien trouvée d’un Acte II en quelque sorte « doublé » par des marionnettes –, le tout sous les lumières soignées d’Hervé Gary.

Paul-Antoine Bénos-Djian (Rinaldo) & Lucile Richardot (Goffredo)  © Pascal Perennec

Côté distribution, ce Rinaldo parvient au sans faute. Dans le rôle-titre, le contre-ténor Paul-Antoine Bénos-Djian – vraie révélation du spectacle – possède un instrument remarquable de souplesse, d’agilité et de justesse  ; il compose un personnage infiniment séduisant, à la fois fougueux et sensible, osant une part de fragilité aussi. A ses côtés, on n’est pas surpris de la fraîcheur et du tact d’Emmanuelle de Negri en Almirena, tandis que le père de celle-ci, Goffredo, trouve en Lucile Richardot une interprète dont l’ampleur vocale et la densité du timbre forcent l’admiration. Impeccable Armida d’Aurore Bucher, dans la séduction comme dans la furie, et Argante idéalement orgueilleux d’un Thomas Dolié en très belle forme vocale. On n’oubliera surtout pas les comédiens Nicolas Cornille et Gaëlle Fraysse, pour le moins épatants dans les diverses expressions humaines et, surtout, animales (avec des masques très réussis) que Claire Dancoisne exige d’eux.
En fosse, Bertrand Cuiller mène son Caravansérail avec énergie et élan ; tous apportent beaucoup à la fluidité et au relief d’un spectacle qui poursuit sa route avec, dans l’immédiat, sept dates partagées entre Nantes et Angers.

Alain Cochard

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(1) Pour en savoir plus sur la Co[opéra]tive : www.concertclassic.com/article/rinaldo-part-en-tournee-avec-la-cooperative-exigence-et-itinerance

(2)On reste toutefois réservé sur le procédé visuel, pas très au point ni très esthétique, utilisé pendant le « Cara sposa » ...
 
Haendel : Rinaldo – Quimper, Théâtre de Cornouaille, 19 janvier 2018 ; en tournée jusqu’au 13 mars ( Nantes, Angers, Besançon, Saint-Louis, Compiègne, Dunkerque, Charleroi, Mâcon, La Rochelle ; www.lacoopera.com/tour/ ), reprise au Festival de Sablé le 24 août 2018.
 
Photo © Pascal Perennec

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